1 Pour la fin.
Vers toi, Seigneur, j'ai élevé mon âme ; 2 mon Dieu, en toi je me confie, je n'en rougirai pas. 3a Et que mes ennemis ne se rient pas de moi.
3b Car tous ceux qui t'attendent ne seront pas confondus.
4a Qu'ils soient confondus, tous ceux qui commettent l'iniquité sans raison.
4b Seigneur, montre-moi tes voies, et enseigne-moi tes sentiers. 5 Dirige-moi dans ta vérité, et instruis-moi, parce que toi ru es mon sauveur, et je t'ai attendu durant tout le jour.
6 Souviens-toi de tes bontés, Seigneur, et de tes miséricordes qui sont de toujours.
7 Des fautes de ma jeunesse, et de mes ignorances ne t'en souviens pas. Selon ta miséricorde, souviens-toi de moi, à cause de ta bonté, Seigneur.
8a Il est doux et droit, le Seigneur ;
8b c'est pour cela qu'il donnera sa loi à ceux qui s'égarent dans la voie. 9 Il conduira ceux qui sont dociles dans la justice, il enseignera ses voies à ceux qui sont doux. 10Toutes les voies du Seigneur sont miséricorde et vérité. Pour ceux qui recherchent son testament et ses témoignages.
11 À cause de ton nom, Seigneur, tu seras propice à mon péché, car il est grand.
12 Quel est l'homme qui craint le Seigneur ? Il a établi pour lui une loi dans la voie qu'il a choisie. 13 Son âme demeurera dans les biens, et sa race aura la terre en héritage. 14 Le Seigneur est un ferme appui pour ceux qui le craignent ; et son testament [est destiné] à leur être manifesté.
15 Mes yeux sont toujours tournés vers le Seigneur, parce que c'est lui qui tirera mes pieds du lacet. 16 Tourne-toi vers moi et aie pitié de moi, parce que je suis unique et pauvre.
17 Les tribulations de mon coeur se sont multipliées ; arrache-moi à mes contraintes. 18 Vois mon humiliation et ma peine, et remets-moi toutes mes fautes.
19 Regarde combien mes ennemis se sont multipliés, et comme ils m'ont haï d'une haine inique.
20 Garde mon âme, et délivre-moi ; que je ne rougisse point, parce que j'ai espéré en toi. 21 Les [hommes] innocents et droits se sont attachés à moi, parce que je t'ai attendu.
22 Ô Dieu, libère Israël de toutes ses tribulations.
1 Pour la fin.
Vers toi, Seigneur, j'ai élevé mon âme ; 2 mon Dieu, en toi je me confie, je n'en rougirai pas. 3a Et que mes ennemis ne se rient pas de moi.
Plus haut le psalmiste a exposé la tribulation du Christ et le secours divin ; ici il y ajoute la prière. Et à ce propos il expose deux choses.
D'abord la prière elle-même.
Puis les mérites de celui qui prie : « Juge-moi, Seigneur. »
Touchant la prière, il fait trois choses :
I) Il commence par la faire connaître.
II) Puis il montre la confiance qui en découle : 8 Il est doux et droit.
III) Enfin il montre que sa prière est assidue : 15 Mes yeux, etc.
I. En faisant connaître sa prière il sollicite trois choses.
A) Il commence par demander la libération de ses ennemis.
B) Puis il demande d'être conduit vers les biens de la justice : 4b tes voies.
C) Enfin il demande que ses péchés soient remis : 6 Souviens-toi.
A. En demandant la libération de ses ennemis il expose trois choses :
1) La préparation à la prière, selon ce verset de l'Ecclésiastique : « Avant la prière, prépare ton âme, et ne sois pas comme un homme qui tente Dieu. »
2) La formulation de la demande : je n'en rougirai pas.
3) Enfin la raison de la demande : Car tous ceux, etc.
1. On se prépare à la prière de deux manières : ou bien par l'élévation de son esprit vers Dieu, comme le dit Damascène : « La prière est une élévation de l'intelligence vers Dieu. » Ou bien par la confiance qu'on a en Dieu.
a. Concernant la première manière il dit : ô Seigneur, moi j'ai élevé mon âme vers toi, par la contemplation, en considérant ta bonté, et par amour : « Élevons nos coeurs avec nos mains vers le Seigneur. »
b. Concernant la seconde manière il dit : nul n'obtient s'il ne prie avec confiance : « Qu'il demande avec foi, sans aucun doute. » - « Approchons avec confiance du trône de la [gloire, ou de sa] grâce. » - « Une telle confiance, nous l'avons en Dieu par le Christ ; non que nous soyons suffisants pour former aucune pensée par nous-mêmes. »
2. Ensuite il formule la demande : et il expose deux choses. La première qui est relative à lui-même en soi, la seconde qui est relative à lui-même par rapport aux ennemis.
a. À propos de la première il dit : je n'en rougirai pas. On rougit de honte pour trois raisons. Ou bien lorsqu'on est opprimé par un ennemi, ou bien lorsqu'on est déçu dans son espérance, ou encore lorsqu'on repasse en son esprit les péchés que l'on a commis. À ce propos l'Apôtre déclare : « Quel fruit avez-vous donc tiré alors des choses dont vous rougissez maintenant ? » Au sujet de la deuxième raison, l'Apôtre dit aussi : « L'espérance ne confond point, car la charité de Dieu a été répandue en nos coeurs par l'Esprit-Saint qui nous a été donné » ; c'est pourquoi le psalmiste dit : Et que mes ennemis ne se rient pas de moi, c'est-à-dire n'aient pas le pouvoir de se rire de moi, ce à quoi ils se préparent : « Voici ceux que nous avons eus autrefois en dérision, et en proverbes outrageants. » - « La simplicité du juste est raillée en dérision. »
3b Car tous ceux qui t'attendent ne seront pas confondus.
b. À propos de la seconde il dit : Car tous ceux.
3. Il expose ici la raison de la demande, et elle est double, autrement dit : je demande de ne point rougir, et de ne pas être tourné en dérision.
a) Et il montre d'abord à qui la confusion ne doit pas être causée.
b) Puis à qui elle doit être causée : Qu'ils soient confondus.
a. Ainsi dit-il d'abord : Car tous ceux qui t'[espèrent] ne seront pas confondus. Ceux-là l'espèrent qui l'attendent avec longanimité : « S'il met un certain délai, attends-le ; car il va venir. » - « Nul n'a espéré dans le Seigneur, et n'a été confondu. »
4a Qu'ils soient confondus, tous ceux qui commettent l'iniquité sans raison.
b. Ici il montre à qui la confusion ou la honte doit être causée, car il dit : tous ceux qui commettent l'iniquité sans raison. Et il y a deux sortes de confusion : une bonne et une mauvaise. - « Il y a une confusion qui amène le péché, et il y a une confusion qui amène la gloire et la grâce. »
- Au sujet de la première il est écrit : « Ils ont été confus parce qu'ils ont commis l'abomination. » Cette confusion est due à la peine et au châtiment éternel.
- Mais le psalmiste poursuit en parlant de la bonne confusion. Ils ne sont pas confondus à propos de la bonne confusion, et c'est pourquoi on traite ici de l'une et l'autre confusion. Car si on l'entend de la mauvaise confusion, alors il ne la souhaite pas mais il l'annonce, ce qui revient à dire : Qu'ils soient confondus, tous ceux qui commettent le mal, c'est-à-dire « qui me persécutent ». sans raison, parce qu'ils ne peuvent point parvenir à leur fin en me persécutant : « Ils combattent contre toi, et ne prévaudront point. » De même, tous ceux qui commettent l'iniquité, c'est-à-dire que les pécheurs soient confondus par leur propre damnation, sans raison, c'est-à-dire ceux qui commettent l'iniquité, car par l'acte même de leur péché ils s'éloignent de Dieu, et sont empêchés d'atteindre la fin, c'est-à-dire la béatitude : « Leurs travaux sont sans fruit », ou impropres. Semblablement on peut l'entendre de la bonne confusion, et ainsi il dit : Qu'ils soient confondus, etc., en souhaitant qu'ils reviennent à la pénitence.
4b Seigneur, montre-moi tes voies, et enseigne-moi tes sentiers. 5 Dirige-moi dans ta vérité, et instruis-moi, parce que toi tu es mon sauveur, et je t'ai attendu durant tout le jour.
B. Ensuite il demande d'être élevé vers les biens.
1) Et il expose d'abord sa demande.
2) Puis il en donne la raison : parce que toi tu es mon sauveur
1. Or il y a deux sortes de biens : le bien de la vie active et celui de la vie contemplative.
a) Il commence par mentionner le bien de la vie active.
b) Puis celui de la vie contemplative : Dirige-moi.
a. Dans la vie active il y a deux manières de progresser : la première est générale et se fait par le précepte, la seconde est particulière et se fait par les conseils.
- À propos de la première manière il dit : Seigneur, montre-moi tes voies. Les voies du Seigneur par lesquelles on parvient à Dieu sont les préceptes : « Si tu veux entrer dans la vie, garde les commandements. » - « S'il marche dans mes préceptes, et les accomplit, celui-là est juste ; il vivra de la vie, dit le Seigneur Dieu. »Car à travers ces voies le Seigneur vient à nous, en particulier par le précepte de la charité : « Si vous m'aimez, gardez mes commandements. » Moi je ne connais pas ces voies, et c'est pourquoi montre-les moi, et quant à l'intelligence et quant à la pratique.
Touchant l'intelligence il est écrit : « Tes yeux verront ton maître, et tu entendras la voix de celui qui, derrière toi, t'avertira. »
Touchant la pratique il dit : et enseigne-moi tes sentiers. La voie est publique et commune, tandis que le sentier est étroit et n'est pas commun, il est au contraire une réduction de la voie commune.
- Semblablement les conseils sont une voie qui mène à Dieu, mais plus étroite et plus courte : « Tenez-vous sur les voies », c'est-à-dire observez les préceptes, « et demandez touchant les sentiers », c'est-à-dire gardez les conseils : « Rendez droits les sentiers de notre Dieu. »
b. Mais les deux, à savoir les préceptes et les conseils, concernent la vie contemplative. D'abord, dans le but de bien se servir des choses connues pour rechercher soigneusement les autres, et ensuite, dans le but d'apprendre les choses inconnues.
- En relation avec le premier but il dit : Dirige-moi dans ta vérité, c'est-à-dire selon ta vérité, ce qui revient à dire : que ta vérité dirige : « Envoie ta lumière et ta vérité. »
- En relation avec le second but il dit : et enseigne-moi, non seulement par l'Écriture et les créatures, mais aussi intérieurement : « Quiconque s'est mis à l'écoute du Père et à son école vient à moi. »
2. parce que toi, Dieu, tu es mon sauveur. Le psalmiste expose ici la raison de la demande mentionnée. L'une s'appuie sur Dieu. L'autre s'appuie sur celui qui demande.
a. Elle s'appuie sur Dieu, parce qu'il est lui-même le sauveur et le créateur du salut humain, qui consiste principalement dans la connaissance de la vérité : « Lui qui veut que tous les hommes soient sauvés, et viennent à la connaissance de la vérité. Car il n'y a qu'un Dieu et qu'un médiateur entre Dieu et les hommes, le Christ Jésus » vrai sauveur : « Un Dieu juste et qui sauve : il n'y en a pas excepté moi. »
b. Semblablement elle s'appuie sur celui qui demandé, car je n'attends d'enseignement de personne excepté de toi. Lui que j'ai attendu durant tout le jour.
- Il est écrit dans un psaume : « Ceux qui attendent avec constance le Seigneur, ceux-là même hériteront de la terre. » Et de même dans un autre psaume : « Que ton coeur se fortifie, et attends avec constance le Seigneur. »
6 Souviens-toi de tes bontés, et de tes miséricordes qui sont de toujours.
C. Le psalmiste demande ici la rémission de ses péchés, etc. Il fait deux choses.
1) Il expose d'abord sa demande en général.
2) Puis il l'explique en particulier : 7 Des fautes.
1. D'une manière générale il demande la miséricorde. Elle concerne ici en particulier la misère. Et sa plus grande misère est sa faute. Or la misère s'oppose à la félicité qui consiste principalement en un acte de vertu parfaite. Puis dans les biens extérieurs. Ensuite dans les détriments et dans les choses extérieures : « Le péché rend les peuples malheureux. » Et c'est pourquoi il demande la miséricorde face aux péchés. Ainsi dans cette miséricorde on distingue deux choses : l'usage ou l'effet de la miséricorde qu'on appelle miseratio. Puis la miséricorde elle-même qui est ainsi appelée en tant qu'elle est une vertu. Donc lorsque Dieu a pitié en acte, on dit alors qu'il est miséricordieux ; mais il semble oublier quand il n'a pas pitié en acte, c'est pourquoi il dit : Souviens-toi de tes bontés. - « Dieu oubliera-t-il d'avoir pitié ? » Cependant c'est en vue de nos biens qu'il diffère son acte de pitié, bien qu'il semble oublieux selon l'opinion humaine, quand il n'a pas pitié en acte ; c'est pourquoi il dit : Souviens-toi, de crainte que tu ne paraisses oublieux vis-à-vis des méchants. et de tes miséricordes. Il dit cela à cause des multiples effets de la miséricorde divine à l'égard de la nature humaine. qui sont de toujours, c'est-à-dire depuis le commencement de la création : « Sa miséricorde s'étend d'âge en âge. »
7 Des fautes de ma jeunesse, et de mes ignorances ne t'en souviens pas. Selon ta miséricorde, souviens-toi de moi, a cause de ta bonté, Seigneur.
2. Ici le psalmiste explique pourquoi il a besoin de la miséricorde, ce qui revient à dire : je demande maintenant la miséricorde, car j'ai commis des pêchés, qui, ainsi qu'il le dit, appellent la miséricorde. Et il expose trois choses qui contribuent à la rémission du péché.
a. D'abord le genre du péché, et il y en a deux : l'un est un péché de transgression, et l'autre d'omission. Et ces derniers, c'est-à-dire les péchés d'omission, sont appelés fautes, comme s'ils étaient moins graves, en quelque façon assez susceptibles de pardon, car il est difficile à l'homme de se garder totalement d'une faute, et c'est pourquoi le psalmiste dit : Des fautes. - « Si un homme est tombé par surprise en quelque faute, vous qui êtes spirituels, instruisez-le en esprit de douceur. »
b. Puis la condition de celui qui pèche : car plus un homme est doué de qualités intellectuelles, et occupe une haute situation, plus la gravité de son péché augmente en lui. Et c'est pourquoi les péchés qui se commettent au cours de la jeunesse sont tenus pour moindres que ceux qui se commettent au cours de la vieillesse : « Le pécheur de cent ans sera maudit. » Et c'est pourquoi il dit : Des fautes de ma jeunesse. Au sens littéral, il prie pour ceux qui se sont rendus coupables de fautes dès leur jeunesse, selon qu'il est écrit dans la Genèse : « Les sentiments de l'homme sont inclinés vers le mal », c'est-à-dire vers le péché, « dès sa jeunesse ».
- « L'adolescence et la volupté sont choses vaines. » Ou bien : de ma jeunesse, c'est-à-dire dès la naissance, car l'homme naît fils de la colère. Et aussi longtemps que l'homme est jeune, il habite dans la maison de son père ; de même aussi longtemps que l'homme est pécheur, il habite dans la maison du diable, qui est une demeure en ruine : « Un vent s'est élevé du côté du désert et a ébranlé les quatre coins de la maison, qui, s'écroulant, a écrasé tes enfants, et ils sont morts ; et j'ai fui, moi seul, pour te l'annoncer. » Ou bien : de ma jeunesse, c'est-à-dire des péchés commis par orgueil. Car les jeunes gens sont naturellement orgueilleux et présomptueux.
c. Enfin la motivation qui amène à commettre le péché, car les péchés qui se commettent par ignorance sont de moindre gravité, aussi dit-il : et de mes ignorances ne t'en souviens pas. - « J'ai obtenu miséricorde, parce que j'ai agi par ignorance, dans l'incrédulité. » - « Ne te souviens pas de nos iniquités anciennes, mais souviens-toi de ta miséricorde. »
Le psalmiste poursuit en exposant la raison de sa demande. Il ne demande pas que ses péchés lui soient remis en raison de ses mérites, parce que la miséricorde n'est pas due au mérite. Et c'est pourquoi il allègue deux choses du côté de Dieu, c'est-à-dire la miséricorde et la bonté, qui sont en Dieu comme dans leur sujet, mais diffèrent dans leur objet. Ainsi en Dieu on considère la bonté, c'est-à-dire la communication des biens dans les créatures, car le bien est diffusif de soi. Tandis que la miséricorde désigné une profusion particulière de sa bonté pour écarter le malheur ; et c'est pourquoi il dit : Selon ta miséricorde, souviens-toi de moi, non de mes péchés : « Nous répandons nos prières devant ta face, non en vue de notre justice, mais en vue de tes miséricordes abondantes. » - « Que promptement nous préviennent tes miséricordes », parce que « nous sommes devenus pauvres à l'excès ». Ne te souviens pas seulement de moi à cause de ta miséricorde, grâce à laquelle tu m'épargnes des malheurs, mais aussi à cause de ta bonté, grâce à laquelle tu fais toutes choses bonnes ; et tel est Dieu lui-même, puisqu'il est l'être de la bonté.
8a Il est doux et droit, le Seigneur ;
II. Plus haut le psalmiste a demandé que ses péchés soient remis par la miséricorde divine, mais ici il expose la confiance qui découle de la miséricorde divine ; et à ce propos il fait deux choses.
A) Il expose d'abord la cause de cette confiance.
B) Puis cette foi fiduciale qui en découle : 11 À cause de ton nom.
A. À propos de la cause de cette confiance il mentionne deux choses.
1) Il explicite d'abord la cause de la confiance envers la bonté divine.
2) Puis il expose l'effet de la bonté divine : 8b c'est pour cela qu'il donnera sa loi, etc.
1. Il faut noter qu'à propos de la bonté divine il mentionne deux choses : la douceur et la rectitude, car Il est doux et droit. La douceur est à proprement parler dans les réalités matérielles, mais au sens métaphorique elle se trouve dans les réalités spirituelles. C'est pourquoi il faut que dans les réalités spirituelles la douceur emprunte sa similitude à la douceur corporelle. Or la douceur corporelle a les propriétés suivantes : elle refait le goût corporel, elle repose et procure la délectation ; semblablement aussi la douceur spirituelle repose et refait, et apporte la délectation au goût spirituel. Mais en Dieu est la douceur par essence : « Cette nourriture qui venait de toi montrait la douceur que tu as pour tes enfants. » Mais chez les hommes on appelle douceur la satisfaction qu'ils se donnent à eux-mêmes ou bien aux autres, en s'adonnant au mal ou au péché ; mais en Dieu il n'y a de douceur que dans les biens, et c'est pourquoi le psalmiste ajoute : et droit, le Seigneur. - « Tu es juste, Seigneur, et droit est ton jugement », de telle sorte que la douceur se réfère à la miséricorde, la rectitude à la justice.
8b c'est pour cela qu'il donnera sa loi à ceux qui s'égarent dans la voie. 9 Il conduira ceux qui sont dociles dans la justice, il enseignera ses voies à ceux qui sont doux. 10 Toutes les voies du Seigneur sont miséricorde et vente. Pour ceux qui recherchent son testament et ses témoignages.
2. Ici le psalmiste expose l'effet de la bonté divine. Or il y a trois catégories d'hommes chez qui se trouve la justice de la bonté divine.
a) La première catégorie est celle des pécheurs.
b) La deuxième est celle des pénitents.
c) La troisième est celle des justes.
a. À l'égard des pécheurs, Dieu manifeste sa bonté en les corrigeant, aussi dit-il : c'est pour cela, c'est-à-dire à cause de sa douceur et de sa rectitude, qu'il donnera sa loi à ceux qui s'égarent dans la voie.
- « La loi a été établie à cause des transgressions. » Et c'est pourquoi la bonté de Dieu est telle qu'elle corrige ceux qui s'égarent. Et il dit : à ceux qui s'égarent, parce que selon ce verset de la première épître à Timothée : « La loi n'est pas établie pour le juste. » De même il dit : dans la voie, parce que dans la voie se trouve l'état du mérite ou du péché. Ou bien, dans la voie, c'est-à-dire de la foi, car elle est appelée la voie par laquelle on va à Dieu : « Il faut que celui qui s'approche de Dieu croie qu'il est. » Donc, même si l'on s'égare dans la foi on est ramené vers Dieu par la correction. Ou bien, il donnera la loi de la charité : « L'amour est la plénitude de la loi », afin que par la charité ils aient la rémission des péchés. - « La charité couvre toutes les fautes. » Ou bien, à ceux qui s'égarent dans la voie de la justice en les corrigeant : « Ils n'ont pas connu la voie de la sagesse », et pour ces derniers il établit la loi.
b. Le deuxième effet, c'est qu'il conduit les pénitents, aussi dit-il : « Il conduira ceux qui sont dociles dans la justice. » Or une bête devient docile lorsqu'après avoir abandonné sa férocité, elle se soumet à l'homme ; de même les hommes, lorsqu'ils renoncent à leurs péchés, sont soumis à Dieu, et c'est pourquoi il dit : dans la justice, c'est-à-dire de la correction, parce que par la justice correctionnelle ils progressent vers les biens les meilleurs, et ils progresseront davantage au jugement dernier, au cours duquel les pénitents parviendront à l'héritage de la vie éternelle et entendront la sentence en leur faveur : « C'est à l'homme de préparer son âme, et au Seigneur de gouverner sa langue. » La mansuétude est une vertu qui apaise la colère, colère qui entrave fortement la connaissance, et elle se manifeste surtout dans les soulèvements des mers. Et cette vertu doit être particulièrement recherchée ; c'est ce qui explique pourquoi Denys, dans sa lettre à Dèmophile, dit que Moïse fut digne d'être favorisé de l'apparition de Dieu à cause de sa grande mansuétude.
c. Le troisième effet est qu'il instruit les justes, c'est pourquoi il dit : il enseignera ses voies à ceux qui sont doux. On appelle mansuetus (doux) celui qui de l'état sauvage est amené à la bonté, ou à l'humilité ; mais sont appelés mites (doux) ceux qui le furent toujours. Ces derniers sont pris en pitié par Dieu, car la doctrine du Seigneur s'acquiert par l'homme en tant qu'homme et non en tant que bête : « Qui nous donne plus d'instruction qu'aux bêtes de la terre ? » Le propre de l'homme, c'est-à-dire sa raison, est corrompu par la passion de l'irascible et du concupiscible ; et la mansuétude tempère la passion de l'irascible, mais la tempérance la passion du concupiscible. Et c'est pourquoi ceux qui sont appelés doux, méritent de recevoir la doctrine du Seigneur : « À qui enseignera-t-il la science ? et à qui fera-t-il comprendre ce qui aura été entendu ? À des enfants qu'on vient de sevrer, d'arracher aux mamelles. »
Il explicite ensuite les voies qu'il enseigne, aussi dit-il : Toutes les voies du Seigneur. Les voies du Seigneur sont ses démarches en toute oeuvre, ce qui revient à dire : moi j'ai trouvé cette voie. Les démarches du Seigneur dans ses oeuvres se réfèrent à deux choses : à la miséricorde et à la justice, car si l'on dit quelque chose à propos de Dieu et à propos de l'homme, on le comprendra pour chacun selon son mode particulier. Ainsi lorsqu'on parle de la miséricorde au sujet de Dieu, on le comprend sous le mode divin, et pour l'homme selon le mode humain. La miséricorde se manifeste dans l'homme lorsqu'il compatit aux malheurs d'autrui, et la justice lorsqu'il rend à chacun ce qui lui est dû. Mais en Dieu ce n'est pas selon ce mode, car Dieu est impassible et ne compatit pas ; car la compassion c'est l'acte de souffrir avec autrui, la souffrance née d'une tribulation étrangère ayant été assumée en soi. De même Dieu ne doit rien à personne. Il y a donc miséricorde en Dieu lorsqu'il éloigne l'adversité en toute chose, de telle sorte que les adversités sont largement assumées à la place de ce défaut. Il y a justice en Dieu lorsqu'il donne à chacun selon sa mesure. Et nous trouvons ces deux choses dans toutes les oeuvres de Dieu, car dans la première création de ces oeuvres on ne trouve pas la règle de la justice, mais celle de la miséricorde, car il ne doit rien au néant ; mais par la suite, quand les choses furent créées, il accorda tout ce qui est approprié à ces choses selon leur mesure, et en cela s'est manifestée la justice divine. Et ainsi fait-il aussi dans les effets de la grâce : car la première justification du pécheur relève de la miséricorde ; et après avoir été justifié il donne les récompenses, parce qu'il donne selon sa mesure. Et ainsi la miséricorde précède, et puis vient la justice ; et c'est pourquoi il dit : Toutes les voies du Seigneur sont miséricorde et vérité.
- « Toutes tes voies sont miséricorde et vérité. » - « Ses commisérations s'étendent sur toutes ses oeuvres. » - « Ta vérité demeure de génération en génération : tu as fondé la terre, et elle demeure stable. » Mais à qui les voies du Seigneur semblent-elles miséricorde et justice ? Non aux impies et aux pécheurs, au contraire il semble qu'elles leur soient cruelles et injustes, ainsi qu'on l'a dit : « La voie du Seigneur n'est pas juste », disent les pécheurs ; mais pour les bons et les justes les voies du Seigneur semblent telles qu'on l'a dit : « Que Dieu est bon pour Israël, pour ceux qui ont le coeur droit. » Et il dit pour qui les voies du Seigneur sont miséricorde et vérité, car c'est pour ceux qui recherchent son testament et ses témoignages. Une version de Jérôme lit : custodientibus (pour ceux qui gardent). Mais qu'entend-t-on par son testament et ses témoignages ? Le testament est en général tout pacte de Dieu, tandis que les témoignages sont toutes les promesses de Dieu. Or Dieu promet son secours, et il recourt en outre aux miracles. Ou bien le mot testament est pris au sens de Nouveau Testament, dans lequel toutes les promesses sont accomplies ; le mot témoignage désigne l'Ancien Testament qui est le témoignage du Nouveau : « C'est à lui que tous les prophètes rendent ce témoignage. » Ou bien on dit témoignage lorsqu'une vérité est attestée : « Il a gardé le serment qu'il a juré à vos pères. » Ou encore, on appelle témoignage l'attestation de la loi de l'esprit selon les juristes ; et l'attestation peut être appelée manifestation, ou confirmation, ou certitude. Car les témoins manifestent et certifient, et c'est dans ce sens que le testament est pour ainsi dire appelé une manifestation et une certification de l'esprit divin, ou ce que Dieu veut. Ou bien, selon Papias, on appelle « testament » dans la Sainte Écriture le pacte ou l'accord ; et on appelle « témoignage » tout ce qui est emprunté à une réalité extérieure pour engendrer la foi.
11 À cause de ton nom, Seigneur, tu seras propice à mon péché, car il est grand.
B. Le psalmiste expose ici la confiance
conçue de la miséricorde divine et de la justice, et à cet égard il fait deux choses.
1) Il expose d'abord la confiance qu'il a vis-à-vis de lui-même.
2) Puis il invite les autres à avoir confiance : 12 Quel est l'homme ?
1. En parlant de lui-même il fait deux choses :
a) Il expose d'abord sa propre confiance.
b) Puis il en donn la raison.
a. Il dit que le Seigneur donnera sa loi, etc., et cela regarde sa bonté ; et c'est pourquoi il ajoute : moi j'ai confiance qu'il sera propice à mon péché, c'est-à-dire qu'il remettra mon péché : « Qui est celui-ci, qui remet même les péchés ? » Et il fera cela non point à cause de nos mérites, car ces péchés méritent un châtiment, mais à cause de ton nom. Le nom de Dieu est entendu ici non seulement en tant que tel, mais il s'agit aussi de la réalité signifiée par ce nom, qui est la bonté divine ; autrement dit : à cause de sa bonté il me remettra mon péché : « Sauve-moi à cause de ton nom », c'est-à-dire afin que ton nom soit glorifié. Et cela convient surtout au nom de Jésus-Christ qui est un nom qui porte le salut, comme on le lit dans Matthieu.
b. Et pourquoi ? À cause de ton nom, car mon péché est si grand qu'avec raison il ne mérite pas de rémission, aussi dit-il : car il est [considérable], c'est-à-dire grand et grave, par son ampleur et sa multiplicité : « Nous faisons tous beaucoup de fautes », au moins véniellement : « Le juste tombera sept fois » par jour « et se relèvera ». Ou bien considérable, par la gravité : « Mes iniquités se sont élevées au-dessus de ma tête ; et comme un fardeau pesant, elles se sont appesanties sur moi. » Ou bien ce verset est prononcé contre les novatiens qui se disaient cathares, c'est-à-dire purs. Le prêtre Novatien vécut au temps de Dèce, et ce dernier disait que nul ne pouvait revenir à la pénitence après avoir failli à la suite du baptême. Mais si cela avait été vrai, le psalmiste aurait dit en vain : tu seras propice à mon péché.
12 Quel est l'homme qui craint le Seigneur ? Il a établi pour lui une loi dans la voie qu'il a choisie. 13 Son âme demeurera dans les biens, et sa race aura la terre en héritage. 14 Le Seigneur est un ferme appui pour ceux qui le craignent ; et son testament [est destiné] à leur être manifesté.
2. Le psalmiste invite ici les autres à avoir confiance.
a) Et il expose d'abord ce qui est nécessaire de notre côté.
b) Puis ce qu'il faut espérer en Dieu.
a. De notre côté, il est requis que nous nous soumettions, autrement c'est en vain que nous aurions confiance. Donc la première soumission se fait par la crainte : « Le commencement de la sagesse est la crainte du Seigneur », aussi dit-il : Quel est l'homme qui craint le Seigneur ? - « Vous qui craignez le Seigneur, croyez en lui, et votre récompense ne sera pas anéantie. »
b. Du côté de Dieu, trois choses sont à espérer, en ce sens qu'il y a trois facultés dans l'homme : l'intellect, la volonté, et la puissance d'agir (virtus operativa) opérative. Ainsi Dieu instruit l'intellect, satisfait à la volonté, et fortifie la puissance.
- Au sujet de l'intellect il dit : Il a établi pour lui une loi dans la voie qu'il a choisie, c'est-à-dire que l'homme qui craint le Seigneur a choisi la voie, à savoir servir Dieu : « Servez le Seigneur dans la crainte. » Voici la voie, marchez-y. Et dans cette voie il enseigne comment l'homme progresse. Une version de Jérôme lit : « Docebat eum (Il l'enseignait) », et il fait cela en établissant une loi.
- Quant à la volonté de l'homme, elle se réfère à deux choses en ce monde :
· D'abord à la possession des biens.
· Puis au legs de ces biens à ses enfants, et dans ce domaine Dieu satisfait aussi temporellement ceux qui le craignent.
· C'est pourquoi au sujet de la possession des biens il dit : Son âme demeurera dans les biens. Mais il vaut mieux comprendre cela au sens spirituel. Et ici il semble mentionner deux choses : l'affluence des biens : Son âme demeurera dans les biens, en tant qu'il s'agit de la volonté dont l'objet est le bien. Ainsi donc l'homme demeure dans les biens, lorsqu'il se rassasie des choses spirituelles : « C'est lui qui remplit de biens ton désir », c'est-à-dire des biens de la vie présente, autrement dit des puissances spirituelles, et des biens de la gloire dans l'avenir.
· Ensuite il mentionne la stabilité : et sa race aura la terre en héritage. et sa race, c'est-à-dire les oeuvres de l'homme spirituel, oeuvres qui sont nos enfants. Et celui-ci aura la terre en héritage, c'est-à-dire lorsque cet héritage sera donné, à savoir la terre des vivants : « Je crois que je verrai les biens du Seigneur dans la terré des vivants. » Ou bien : sa race, c'est-à-dire notre corps glorifié, aura cette terre en héritage, à cause des bonnes oeuvres.
- Quant à la puissance d'agir de l'homme, il dit : Le Seigneur est un ferme appui pour ceux qui le craignent.
· Et il expose d'abord l'affermissement de sa puissance opérative.
· Puis il expose la finalité du testament du Seigneur : et son testament.
· Ainsi dit-il : les autres hommes sont affaiblis par la crainte du monde, car ils hésitent, mais la crainte de Dieu les rend forts, car il est écrit : « Celui qui craint le Seigneur ne s'alarmera de rien, et il n'aura pas peur, parce que le Seigneur lui-même est son espérance. » Et c'est pourquoi il ajoute : son espérance est un ferme appui ; et celui-ci est affermi en vue du moment où le Seigneur lui manifeste son testament, c'est-à-dire sa promesse.
· Tel est donc le testament, ou la promesse qu'il fait au sujet de la venue du Christ, lui qui par sa venue s'est manifesté à Siméon craignant Dieu ; ou bien il s'agit de la promesse au sujet de la vie éternelle : « Moi je l'aimerai, et je me manifesterai à lui. » Une version de Jérôme lit ainsi : « Secretum Domini timentibus eum, foedus illius manifestabitur illis (Le secret du Seigneur [est) pour ceux qui le craignent, son alliance leur sera manifestée). » En effet la promesse de la vie éternelle se fait dans le secret, comme on le dit dans Isaïe : « L'oeil n'a pas vu, ô Dieu, toi excepté, ce que tu as préparé pour ceux qui t, aiment. » Et cela est donné à ceux qui le craignent. - « Qu'elle est grande, Seigneur, l'abondance de ta douceur que tu as réservée en secret à ceux qui te craignent. » Et ce secret est l'alliance qu'il a promise à ceux qui le craignent : « Il se lèvera pour vous qui craignez mon nom, un Soleil de justice. »
15 Mes yeux sont toujours tournés vers le Seigneur, parce que c'est lui qui tirera mes pieds du lacet. 16 Tourne-toi vers moi et aie pitié de moi, parce que je suis unique et pauvre.
III. Plus haut le psalmiste a exposé la confiance qu'il a conçue de la miséricorde divine, et il a également invité les autres à cette confiance ; mais ici, pour la seconde fois il ajoute la prière à la confiance qu'il a conçue. Et à ce propos il fait deux choses.
Il fait d'abord mention de la préparation en vue de la prière : « Avant la prière, prépare ton âme. »
Ensuite il expose la prière elle-même : Tourne-toi vers moi.
Concernant la prière proprement dite il fait deux choses :
A) Il expose d'abord la prière dans laquelle il prie pour lui-même.
B) Ensuite celle qui concerne ses ennemis : 19 Regarde combien mes ennemis.
A. En priant pour lui-même il fait deux choses :
1) Il demande d'abord la miséricorde.
2) Ensuite il donne la raison pour laquelle il fait miséricorde : Les tribulations.
La préparation de la prière consiste en l'élévation de l'âme vers Dieu, c'est pourquoi il dit : Mes yeux, c'est-à-dire du coeur : « Qu'il éclaire les yeux de votre coeur. » Ces yeux, c'est-à-dire ceux de l'intelligence et de la foi, sont dits être spécialement tournés vers le Seigneur : « J'ai levé mes yeux vers toi, qui habites dans les cieux. » Et cela en raison de la confiance conçue : parce que c'est lui qui tirera mes pieds du lacet. - « L'homme ne connaît pas sa fin : et comme les poissons sont pris à l'hameçon, et comme les oiseaux sont retenus par le lacs, ainsi sont pris les hommes », par le diable, « au temps du malheur ». Ces maux sont des occasions de péché. Et quand l'homme tombe dans le péché, alors il est lié par le lacet de sa passion, qu'on appelle péché de l'homme. Dieu seul libère de ce lacet : « Le filet s'est rompu, et nous avons été délivrés. » Et comment ? « Notre secours est dans le nom du Seigneur. »
1. Ensuite il demande la miséricorde, et c'est pourquoi il dit : Tourne-toi vers moi et aie pitié de moi, etc. Le Seigneur semble détourner ses yeux lorsqu'il n'exerce pas sa miséricorde, mais tourne son regard quand il l'exerce ; voilà pourquoi Pierre pleura à la vue du Christ. Ainsi dit-il : Tourne-toi vers moi, etc. - « Sa miséricorde est pour ses saints. » Il poursuit en exposant la raison pour laquelle il a besoin de miséricorde ; c'est, dit-il, parce qu'il est unique. Cela se comprend ainsi selon un premier sens, car celui qui ne trouve pas de secours en lui, il faut qu'il se tourne vers Dieu : « Mon secours vient du Seigneur. » Or les hommes jouissent d'un double secours en ce monde : le premier vient des amis, l'autre des moyens ; mais dans le cas présent il ne jouit ni de l'un ni de l'autre : car il n'a pas celui des amis, aussi dit-il : parce que je suis unique, c'est-à-dire solitaire, sans secours des proches et des amis : « Je tournais mes regards vers le secours des hommes, et il n'en était point. » De même ni celui des moyens, car il est pauvre. - « Je suis un pauvre, moi, et dans les travaux depuis ma jeunesse. » Ou bien, selon un autre sens. Deux choses sont nécessaires pour que l'homme soit aidé par Dieu : d'abord, que son coeur tende totalement vers Dieu : « Je demanderai une seule chose au Seigneur, je la rechercherai : c'est d'habiter dans la maison du Seigneur tous les jours de ma vie. » - « Une seule chose est nécessaire. » Et tel est ce qu'il dit : parce que je suis unique, c'est-à-dire parce que je tends à l'unique. Ensuite, qu'il soit contempteur des choses mondaines, autrement il n'est pas unique et ne plaira pas à Dieu seul. C'est pourquoi il dit : parce que je suis pauvre, c'est-à-dire parce que je méprise toutes choses à cause de toi.
17 Les tribulations de mon coeur se sont multipliées ; arrache-moi à mes contraintes. 18 Vois mes humiliations et ma peine, et remets-moi toutes mes fautes.
2. Ici il expose trois choses relatives à son adversité : deux choses concernant sa peine, et la troisième touchant sa faute.
a. Or il y a deux sortes de peine. L'une est infligée par nécessité. L'autre est assumée par la volonté. Les peines infligées font deux choses : elles affligent intérieurement le coeur, et contraignent extérieurement le corps.
- En relation avec l'affliction du coeur il dit : Les tribulations de mon coeur se sont multipliées, c'est-à-dire par divers événements, et en raison des nombreuses tribulations qui arrivent, celles-ci pénètrent jusqu'au coeur, comme des tribules piquants : « Mes gémissements sont nombreux, et mon coeur est triste. »
- En relation avec l'affliction du corps il dit : arrache-moi à mes contraintes. Les tribulations appellent des contraintes, en tant que les tribulations sont utiles, selon ce qui est écrit dans l'épître aux Romains : « La tribulation produit la patience ; la patience, l'épreuve ; et l'épreuve l'espérance ; or l'espérance ne confond point. »
- « La patience rend les oeuvres parfaites. » Selon la Glose : « La patience n'est pas vaincue, le parfait est éprouvé. » Et c'est pourquoi elles sont utiles en tant qu'elles humilient : « Bien plus nous nous glorifions même dans les tribulations, sachant que la tribulation produit la patience, etc. » Ou bien, on appelle tribulations les pénuries : « Il t'a affligé par la disette. » De même il est écrit dans l'épître aux Romains : « Subvenant aux contraintes des saints. » Ou bien, elles sont appelées tribulations à cause de la violence qui est une contrainte. Mais l'affliction assumée intérieurement est une humilité d'esprit devant Dieu, c'est pourquoi il dit : Vois, c'est-à-dire considère mon humilité : « Il a tourné son regard vers l'humilité de sa servante. » De même l'affliction, qui est une peine, est aussi une humilité manifestée extérieurement, aussi dit-il : et ma peine. - « Ils ne seront pas sujets à la peine des hommes, et avec les autres [hommes) ils ne seront pas frappés. » À propos des hommes de bien il est écrit dans la Sagesse : « Le fruit des bons labeurs est glorieux. »
b. Au sujet de la faute il dit : remets-moi toutes mes fautes. - « Tes péchés seront remis quand tu le demanderas. » Et notez qu'on obtient la rémission des péchés de trois manières :
- Par les tribulations qui opèrent la rémission des péchés, si on les supporte avec patience : « Au temps de la tribulation tu remets les péchés à ceux qui t'invoquent. [ après la tempête tu fais le calme et après les larmes et les soupirs tu répands la joie. »
- De même par l'humilité : « Puisque Achab s'est humilié devant moi, je n'amènerai pas le malheur en ses jours. »
- « D'un coeur contrit et humilié, ô Dieu, tu n'auras point de mépris. »
- Semblablement par la peine : « Il regarda notre humiliation, notre peine et nos angoisses, et il nous retira de l'Égypte par une main forte. » Et c'est pourquoi il dit : remets-moi toutes mes fautes.
19 Regarde combien mes ennemis se sont multipliés, et comme ils m'ont haï d'une haine inique.
B. Ici le psalmiste prie en demandant du secours contre ses adversaires.
1) Et il amène d'abord Dieu à considérer ses ennemis.
2) Puis il demande du secours contre eux : Garde mon âme.
3) Enfin il en donne la raison : que je ne rougisse point.
1. Ainsi dit-il : Regarde, avec l'oeil de la miséricorde, combien mes ennemis, afin de les prendre en pitié et de les convertir : « Priez pour ceux qui vous persécutent et vous calomnient. » - « Lorsque sa voie plaira à Dieu, il réduira à la paix ses ennemis eux-mêmes. » Et je demande cela en priant, car c'est alors que j'obtiendrai la paix. combien [ils] se sont multipliés. - « Nombreux sont ceux qui me persécutent et qui me tourmentent. » et ils m'ont haï d'une haine inique. Il y a deux sortes de haines. La première haine est bonne, c'est lorsqu'on hait le péché ou le pécheur à cause de la faute : « Je les haïssais d'une haine parfaite. » Semblablement il y a une haine inique, c'est lorsqu'on hait la nature ou la justice, c'est pourquoi il dit : ils m'ont haï d'une haine inique, c'est-à-dire injuste et sans raison : « C'est afin que s'accomplisse la parole qui est écrite dans la Loi : Ils m'ont haï sans raison. »
20 Garde mon âme, et délivre-moi ; que je ne rougisse point, parce que j'ai espéré en toi.
21 Les [hommes] innocents et droits se sont attachés à moi, parce que je t'ai attendu.
2. Le psalmiste demande ici du secours contre ses ennemis, car ils sont nombreux et iniques, et c'est pourquoi il sollicite un double secours.
a. Il demande d'abord que Dieu le garde dans les persécutions de crainte qu'elles ne l'emportent sur lui temporellement ou spirituellement, ou bien qu'il le garde afin qu'il ne tombe pas dans le péché.
b. Puis, qu'il le délivre des maux, c'est pourquoi il dit : et délivre-moi, c'est-à-dire totalement des maux, afin de jouir de l'abondance dans la Patrie.
3. Il donne la première raison quand il dit : que je ne rougisse point, car si tu ne me délivres et ne me gardes, je tomberai dans la confusion. Et cela ne doit pas arriver, parce que j'ai espéré en toi. - « Il n'est point de confusion pour ceux qui se confient en toi. » L'autre raison, c'est que tes amis s'appuient sur moi. Parfois Dieu libère quelqu'un non à cause de ses propres mérites, mais de crainte que les amis de Dieu ne périssent avec celui sur lequel ils s'appuient, c'est pourquoi il dit : Les [hommes] innocents et droits se sont attachés à moi. Sont appelés innocents ceux qui s'écartent du mal, droits ceux qui accomplissent le bien : « Tout animal aime son semblable. » Et pourquoi ? parce que je t'ai attendu, c'est-à-dire parce que j'ai espéré en toi : « Que ton coeur se fortifié, et attends le Seigneur. » Une version de Jérôme lit : « Simplicitas et veritas (Simplicité et vérité). »
22 Ô Dieu, libère Israël de toutes ses tribulations.
Ici le psalmiste expose sa demande en faveur de tout le peuple, aussi dit-il : Ô Dieu, libère Israël, c'est-à-dire ce peuple, ou bien ceux que tu as prédestinés à voir Dieu. de toutes ses tribulations. Et cela aura lieu dans la Patrie, lorsque s'accomplira ce que rapporte l'Apocalypse : « Dieu essuiera toute larme de leurs yeux, et il n'y aura plus ni mort, ni deuil, ni cri. »