1 Pour la fin. Psaume par David lui-même.
2 Attendant, j'ai attendu le Seigneur, et il a fait attention à moi. 3 Et il a exaucé mes prières, et il m'a retiré d'un lac de misère, et d'un bourbier de fange. Et il a établi mes pieds sur le rocher, et il a dirigé mes pas. 4a Et il a mis dans ma bouche un cantique nouveau, un chant à notre Dieu.
4b Beaucoup le verront et craindront ; et ils espéreront dans le Seigneur. 5 Bienheureux l'homme dont le nom du Seigneur est l'espérance, et qui n'a point porté ses regards sur des vanités et des folies mensongères.
6 Tu as fait, toi, Seigneur mon Dieu, beaucoup de choses admirables ; et dans tes pensées il n'y a personne qui soit semblable à toi. J'ai annoncé et j'ai parlé ; elles ont été multipliées sans nombre.
7 Tu n'as pas voulu de sacrifice et d'oblation ; mais tu m'as parfaitement disposé les oreilles. Tu n'as pas demandé d'holocauste et de sacrifice pour le péché ; 8 alors, j'ai dit : « Voici, je viens. » En tête du livre, il est écrit de moi 9 que je ferai ta volonté ; mon Dieu, je l'ai voulu, et [j'ai mis] ta loi au milieu de mon coeur.
10 J'ai annoncé ta justice dans la grande assemblée ; voilà que je ne contiendrai pas mes lèvres, Seigneur, toi tu le sais. 11 Je n'ai pas caché ta justice dans mon coeur ; j'ai dit ta vérité et ton salut. Je n'ai pas caché ta miséricorde et ta vérité à un conseil nombreux.
12 Mais toi, Seigneur, n'éloigne pas de moi les effets de ta miséricorde : Ta miséricorde et ta vérité toujours m'ont soutenu. 13 Parce que des maux sans nombre m'ont environné ; mes iniquités m'ont saisi, et je n'ai pu en soutenir la vue. Elles se sont multipliées plus que les cheveux de ma tête ; et mon coeur m'a abandonné.
14 Qu'il te plaise, Seigneur, de me délivrer ; Seigneur, regarde afin de m'aider. 15 Qu'ils soient confondus et qu'ils soient couverts de crainte tous ensemble, ceux qui cherchent mon âme pour me la ravir. Qu'ils soient rejetés en arrière et qu'ils rougissent de honte ceux qui me veulent des maux. 16 Qu'ils portent promptement leur confusion, ceux qui me disent : « C'est bien fait, c'est bien fait ! » 17 Qu'ils exultent et soient dans l'allégresse à ton sujet, tous ceux qui te cherchent ; et qu'ils disent sans cesse : « Que le Seigneur soit magnifié ! » ceux qui aiment ton salut.
18 Pour moi, je suis un mendiant et un pauvre : [mais] le Seigneur prend soin de moi. Toi, tu es mon aide et mon protecteur : mon Dieu, ne tarde pas.
1 Pour la fin. Psaume par David lui-même.
2 Attendant, j'ai attendu le Seigneur, et il a fait attention à moi. 3 Et il a exaucé mes prières, et il m'a retiré d'un lac de misère, et d'un bourbier de fange. Et il a établi mes pieds sur le rocher, et il a dirigé mes pas. 4a Et il a mis dans ma bouche un cantique nouveau, un chant à notre Dieu.
Dans les psaumes précédents, le psalmiste a invoqué le secours divin contre la malice des méchants, et il a montré le propos de sa prudence ; mais ici il traite de la confiance dans le secours divin, et à cet égard il fait deux choses. Il décrit d'abord la confiance elle-même, puis il traite de la miséricorde qui est la cause de la confiance : « Bienheureux celui qui comprend les nécessités. »
En décrivant la confiance elle-même il fait deux choses.
1) Il fait d'abord mémoire de la confiance qui lui vient de Dieu en se référant aux bienfaits passés.
II) Puis en demandant des bienfaits futurs : 12 Mais toi, Seigneur.
I. En se référant aux bienfaits passés il fait deux choses.
A) Il commence par faire mémoire de la confiance qui lui vient de Dieu en énumérant les bienfaits passés ;
B) Puis il montre la miséricorde de Dieu par laquelle il fait du bien : 6 Tu as fait, toi, Seigneur mon Dieu, beaucoup de choses admirables.
Au sens mystique, ce psaume traite du passage de l'Ancien Testament au Nouveau. Il est intitulé : Pour la fin. Psaume par David lui-même. Dans les autres psaumes, le mot « fin » s'entend du Christ : « La fin de la loi est le Christ, pour justifier tout croyant. » Ici, le mot fin s'entend du Nouveau Testament, qui est la fin de l'Ancien : « La fin du précepte est la charité. »
A. Dans la première partie de ce psaume, le psalmiste fait mémoire de trois choses.
1) D'abord de l'efficacité de la confiance en général.
2) Puis il traite de celle-ci en particulier : Et il m'a retiré.
3) Enfin il montre que cette dernière se trouve chez les autres : ils 4b verront.
1. En parlant de l'efficacité de la confiance en général, il fait deux choses.
a) Il traite en premier lieu de la confiance, en montrant qu'elle est efficace.
b) Puis il traite du signe de la confiance.
a. Ainsi dit-il : Attendant. Au sens littéral on comprend que David dans sa propre personne a attendu maintes fois le secours divin. Mais parce qu'il parle au nom de l'Église, il est préférable qu'on l'entende du genre humain attendant la grâce du Nouveau Testament. Et il dit : Attendant, j'ai attendu le Seigneur, afin de montrer la continuité ; car bien qu'il tarde, il ne fait cependant pas défaut : « S'il met [un certain] délai, attends-le ; car il va venir, et il ne tardera pas. » Et ainsi tout homme juste doit toujours demeurer dans la confiance de Dieu, car il ne fait pas défaut à ceux qui espèrent en lui. Ou bien cela se rapporte aux diverses situations de ceux qui attendent : car les patriarches et les prophètes, et tous les autres ont attendu, comme on le pense assez communément. À l'attente extérieure il joint l'intention, lorsqu'il dit : et il a fait attention à moi ; car bien que Dieu entende tous les hommes, cependant il ne fait pas attention à tous, parce que tous ne sont pas ordonnés au bien ; et c'est pourquoi il dit ici : il a fait attention à moi, c'est-à-dire à mon bien.
b. Le signe de la confiance est l'imploration : car nul ne demande finalement à moins d'espérer d'être exaucé. Et c'est pourquoi il dit : Et il a exaucé mes prières. - « Il a regardé favorablement la prière des humbles. »
2. et il m'a retiré d'un lac de misère. Il expose ici l'efficacité de la confiance dans les choses où il a été exaucé. Et il traite de trois choses.
a) D'abord de la libération des maux.
b) Puis de la donation des biens : Et il a établi.
c) Enfin de l'action de grâce des bons : Et il a mis.
a. Il y a en effet un double mal de la misère et de la peine. En parlant du premier il dit : il m'a retiré d'un lac de misère. Et cela peut être aussi rapporté à la misère temporelle dans laquelle David se trouvait jadis. Et on appelle lac la misère temporelle, à cause de sa profondeur et de sa diversité. Cela peut également être rapporté à la misère de la faute, car l'Ecriture dit : « Le péché rend les peuples misérables. » Et l'un et l'autre mal peut être restreint à la faute des vices charnels, lorsqu'il dit : d'un lac de misère, c'est-à-dire de la profondeur des péchés charnels. Ou bien cela peut se référer aux péchés spirituels dont l'homme juste est couvert ; aussi dit-il : d'un bourbier de fange. En se référant aux péchés charnels il ne dit pas simplement boue, mais bourbier de fange, ou de fumier selon Jérôme, parce que la boue dans la terre n'est pas altérée, qu'elle n'est pas de la fange, qu'elle n'est ni fétide ni abominable. Ou bien, lac de misère, c'est-à-dire l'enfer dont les saints sont sortis par le Christ. Et la boue est l'opprobre dont les saints sont sortis, et dans laquelle ils étaient retenus par les démons.
b. Ensuite il traite du don des biens ; et à ce propos il expose deux choses louables. D'abord le fait que l'homme est affermi dans le bien ; et en parlant de cela il dit : il a établi mes pieds sur le rocher, c'est-à-dire mes affections avec lesquelles il me faut marcher dans la voie spirituelle. On appelle rocher le fondement du secours divin : « Le Seigneur est mon rocher. » Ou bien on appelle rocher le Christ : « Or ce rocher était le Christ. » Et ainsi il a affermi sur le rocher, c'est-à-dire le secours divin, ou bien il a affermi sur le Christ mes pieds, c'est-à-dire mes affections. Puis le fait que l'homme progresse dans le bien ; et en parlant de cela il dit : et il a dirigé mes pas, c'est-à-dire il m'a dirigé par sa prévenance vers les biens les meilleurs : « Le coeur de l'homme dispose sa voie ; mais c'est au Seigneur de diriger ses pas. »
c. Ensuite il traite de l'action de grâce, autrement dit : La réalité même que nous louons est au-dessus de mes forces, car elle est plus grande que toute louange : aussi est-il digne de louer Dieu par Dieu ; c'est-à-dire que lui-même a mis dans ma bouche un cantique nouveau. - « Est-ce que vous voulez éprouver celui qui parle en moi, le Christ, qui n'est pas affaibli, mais qui est puissant parmi vous ? »
un cantique nouveau, c'est-à-dire à propos des bienfaits nouveaux ; et c'est l'oeuvre de l'Incarnation : « Le Seigneur a créé un nouveau [prodige] sur la terre : une femme environnera un homme. » Semblablement un nouveau mode de libération : « Avec son propre sang il est entré une fois pour toutes dans le sanctuaire, nous ayant acquis une éternelle rédemption. » Et le Seigneur a mis dans ma bouche un cantique nouveau, parce que le nouveau cantique, c'est le Nouveau Testament : « Je ferai avec vous un pacte éternel [qui montrera] véritables les miséricordes [promises] à David. » - « Nul ne pouvait chanter ce cantique, si ce n'est les cent quarante-quatre mille », parce qu'à nouveau roi, nouvelle loi, nouvelles joies. Les hommes de l'ancienne Alliance chantaient des vieux cantiques : oeil pour oeil, âme pour âme. Ils descendaient aussi aux enfers : car la porte du Royaume leur était fermée, un Chérubin, tenant en main une épée grande, longue et effilée, interdisait l'accès du paradis. Mais tous les hommes de la nouvelle Loi chantent un cantique nouveau, que l'Homme nouveau, le Christ, a apporté : « Voilà que je fais toutes choses nouvelles. » Donc le peuple nouveau chante des nouveaux cantiques, c'est-à-dire à propos de l'Incarnation du Seigneur, de sa Résurrection, de son Ascension, de sa Nativité, et de ses autres mystères. Voilà pourquoi à l'occasion de ces principales solennités les ministres de l'Église, revêtus de blanc ou d'ornements de soie, chantent et lisent un cantique nouveau, que personne ne peut chanter s'il n'a été rénové. Je dis cantique, non point à propos de turpitudes, mais un cantique qui plaise à Dieu ; aussi dit-il : un hymne, ou bien un chant (carmen) qui plaise à notre Dieu, c'est-à-dire à la louange de Dieu : « A toi convient un hymne, ô Dieu, en Sion. » - « Chantant et psalmodiant du fond de votre coeur [à la gloire] de Dieu. »
4b Beaucoup le verront et craindront ; et ils espéreront dans le Seigneur 5 Bienheureux l'homme dont le nom du Seigneur est l'espérance, et qui n'a point porté ses regards sur des vanités et des folies mensongères.
3. Le psalmiste expose ici le bien (utilitas) de la confiance en Dieu chez les autres, à savoir dans leur conversion.
a) Et il expose d'abord le bien lui-même.
b) Puis son fruit : Bienheureux l'homme.
a. Il y a ici un ordre dans le déroulement de la conversion. En premier lieu, il faut que l'homme voie ce à quoi il doit se convertir ; aussi dit-il : Beaucoup verront, à savoir le Christ qui est né. Beaucoup de peuples anciens, qui l'ont attendu, le virent : « Après cela, il a été vu sur la terre, et il a demeuré avec les hommes. » Siméon le vit, lui qui le reçut dans le temple, et beaucoup d'autres : « Mes yeux ont vu ton salut. » - Et : « Beaucoup de rois et de prophètes ont désiré voir ce que vous voyez, et ne l'ont point vu. » Ou bien beaucoup ont vu les miracles du Christ : « Nous avons vu des merveilles aujourd'hui. » Et cela, ou bien par la foi, ou bien par les yeux.
Puis il faut que l'homme craigne celui à qui il doit se convertir ; aussi dit-il : et craindront. - « Celui qui est sans crainte ne pourra être justifié », car « la crainte du Seigneur chasse le péché ».
Enfin, il y a l'espérance : « C'est en espérance que nous avons été sauvés. » Car si l'espérance ne se tenait pas auprès de la crainte, l'homme s'enfuirait loin de Dieu. Et c'est pourquoi il faut que la crainte soit là où le péché fuit, ainsi que l'espérance grâce à laquelle l'homme accède à Dieu.
b. Son fruit sera la béatitude ; aussi dit-il : Bienheureux l'homme dont le nom du Seigneur est l'espérance. Et il expose d'abord ce fruit qui est la béatitude, et à qui elle est due, car elle appartient à ceux qui adhèrent à Dieu. Et c'est pourquoi il expose en premier lieu une vraie affirmation, et il en exclut une fausse. La vraie affirmation est que la béatitude ne se trouve qu'en ceux qui ont l'espérance en lui : « Bienheureux tous ceux qui l'attendent » ; et c'est pourquoi il dit : Bienheureux l'homme dont le nom du Seigneur est l'espérance. Ce nom de Jésus est la vraie espérance, parce que le salut est en lui-même. Aussi est bienheureux celui-là qui n'attend pas les biens temporels de lui, mais le salut éternel que son nom indique. Par conséquent ceux qui attendent le salut de Dieu, ceux-là sont béatifiés. Ou bien : Bienheureux l'homme dont le nom du Seigneur est l'espérance, c'est-à-dire dont l'espérance est l'invocation du nom du Seigneur : « Ceux-ci [se confient] dans des chars, et ceux-là dans des chevaux ; mais nous, c'est le nom du Seigneur que nous invoquerons. » La fausse affirmation est que la béatitude consiste en des choses temporelles ou dans le culte des idoles ; et il exclut cela lorsqu'il dit : il n'a point porté ses regards sur des vanités, c'est-à-dire sur des choses temporelles et sur des jouissances. Dans ce mot vanité est inclus tout ce qui se rapporte aux jouissances et aux choses temporelles : « Vanité des vanités, et tout est vanité. » Il exclut la seconde chose lorsqu'il dit : et dès folies mensongères, c'est-à-dire les cultes des idoles, sur lesquelles sont figurées des choses fausses, à savoir que les hommes sont représentés comme des dieux. De même il y a là beaucoup de débauches et d'impuretés, et l'on s'adonne aux cruautés : « Lorsqu'ils se réjouissent, ils s'abandonnent à la folie, ou ils annoncent comme certaines des choses fausses. » Semblablement elles étaient fausses, parce qu'elles étaient fondées sur la fausseté et non sur la puissance divine, qui ne leur convenait pas : « Assemblez-vous sur les montagnes de Samarie, et voyez les folies nombreuses au milieu d'elle. » À cette idolâtrie se rapportent toutes les superstitions vaines et nuisibles, comme la nécromancie, les divinations et les augures. Ou bien on appelle folies mensongères, l'emportement, la rixe ou les vains spectacles des jeux.
6 Tu as fait, toi, Seigneur mon Dieu, beaucoup de choses admirables ; et dans tes pensées il n'y a personne qui soit semblable à toi. J'ai annoncé et j'ai parlé ; elles ont été multipliées sans nombre.
B. Plus haut le psalmiste a fait connaître sa confiance du côté du Christ et de l'Eglise, ainsi que ses effets, à savoir les multiples bienfaits de Dieu ; mais ici il montre la cause de cette confiance, à savoir comment il est amené à confesser ces bienfaits et l'espérance qui résulte des mérites divins. Et ainsi la cause de la confiance, ce sont les nombreux biens temporels : « Que rendrai-je au Seigneur pour tous [les biens] qu'il m'a faits ? » Et c'est pourquoi on interprète cela selon l'une ou l'autre manière : car le mérite du Christ est la cause de la confiance, et la rétribution des mentes. Cela consiste dans la prédication de la vérité divine : et à cet égard le psalmiste fait trois choses.
1) Il fait d'abord connaître l'acte méritoire, à savoir l'annonce des oeuvres divines.
2) Puis la cause de cette annonce : 7 Tu n'as pas voulu de sacrifice.
3) Enfin son mode : 10 J'ai annoncé ta justice.
1. En faisant connaître l'acte méritoire il montre deux choses.
a) D'abord que sa miséricorde est abondante en vue de l'annonce.
b) Puis il manifeste la cause ou la nécessité de l'annonce : elles ont été multipliées.
a. La matière de l'annonce est abondante. Et d'abord quant à la multiplicité des oeuvres divines, car tu as fait beaucoup. Et ensuite dans les oeuvres de la nature : « C'est lui qui a fait des choses admirables, inscrutables. » - « Admirables sont tes oeuvres, mon âme le reconnaît parfaitement. » Et pour accomplir des miracles il se suffit à lui-même, car il n'est pas instruit par un autre mais uniquement par ses propres pensées. Aussi dit-il : et dans tes pensées, à savoir par les ordonnances de sa sagesse : « Combien magnifiques sont tes oeuvres, Seigneur ! Tu as fait toutes choses avec sagesse. » - « A qui as-tu donné conseil ? » N'est-ce pas à Dieu ? - « Qui a été son conseiller ? » Il est grand en oeuvre et suffisant. Semblablement il excelle en l'une et l'autre chose ; ainsi dans l'accomplissement des miracles, lorsqu'il fit marcher Pierre sur le lac, et dans beaucoup d'autres choses admirables, qui peuvent convenir ici. Et nul ne peut être comparé à ses oeuvres, ni à ses pensées ; aussi dit-il : il n'y a personne qui soit semblable à toi. - « Il n'est point de semblable à toi parmi les dieux, Seigneur ; et il n'est rien de comparable à tes oeuvres. » Voilà ce que l'Ecriture dit pour ses oeuvres. Et pour ses pensées elle dit aussi : « Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant sont élevées mes voies au-dessus de tes voies et mes pensées au-dessus de tes pensées. » Ainsi donc tu as de la matière en abondance pour prêcher ; et voilà pourquoi le psalmiste ajoute : J'ai annoncé et j'ai parlé. Et il dit : J'ai annoncé, en quoi il désigne la manifestation des oeuvres divines, et j'ai parlé, autrement dit : je me suis exprimé plus expressément par le verbe que par le signe. Ou bien, il désigne l'ordre de la prédication. Ou bien, j'ai annoncé donc le Christ par les prophètes, et j'ai parlé, moi-même en personne : « C'est moi-même qui parlais, me voici présent. »
b. La nécessité de prêcher fût la multitude des mauvais, car ils se sont multipliés plus que le nombre des bons. Et ainsi, pour que les mauvais soient diminués en nombre et que les bons s'accroissent, il faut que l'annonce leur soit faite : « Resserrée est la voie qui conduit à la vie, et large est la voie qui conduit à la perdition. » Ou bien : ils ont été multipliés sans nombre. - « Infini est le nombre des insensés. » Ou bien autrement, pour signifier l'effet de la prédication, à savoir que les bons se sont multipliés par la prédication au-delà du nombre estimé : « Que le Seigneur Dieu de vos pères ajoute à ce nombre des milliers de milliers. » - « Les fils de la délaissée seront plus nombreux que les fils de celle qui a un mari. » La version iuxta Hebraeos de Jérôme lit : « Multa fecisti, Deus meus, mirabilia tua, et cogitationes tuas, pro nobis (Tu as fait beaucoup de choses pour nous, tes [oeuvres] admirables et tes pensées, ô mon Dieu) », pour nous, c'est-à-dire pour notre salut : « Moi je pense des pensées de paix. » Et la version iuxta Hebraeos poursuit : « Non inveni ordinem coram te (je n'ai pas trouvé d'ordonnance devant toi). » Et on dit cela, parce qu'il n'y a personne qui soit semblable à toi. Et Jérôme continue : « Si annuntiare et enarrare voluero, plura sunt quam annuntiari queant (Si je voulais les annoncer et les raconter, elles sont si nombreuses qu'elles ne peuvent être annoncées) » ; autrement dit : elles sont si nombreuses qu'elles ne peuvent être énumérées. Et ainsi Jérôme expose aussi l'effet des oeuvres divines lorsqu'il dit : elles ont été multipliées sans nombre.
7 Tu n'as pas voulu de sacrifice et d'oblation ; mais tu m'as parfaitement disposé les oreilles. Tu n'as pas demandé d'holocauste et de sacrifice pour le péché ; 8 alors, j'ai dit : « Voici, je viens. » En tête du livre, il est écrit de moi que je ferai ta volonté ; mon Dieu, je l'ai voulu, et [j'ai mis] ta loi au milieu de mon coeur.
2. Ici le psalmiste justifie la raison pour laquelle il donne à Dieu cette compensation pour ses bienfaits, ou bien il explique pourquoi il a prêché. Et il justifie cette cause de deux manières.
a) Il expose d'abord comme cause la volonté divine.
b) Puis son intention : 8 alors, j'ai dit.
a. Concernant la volonté divine, il faut savoir que dans l'Ancien Testament des sacrifices étaient offerts pour les bienfaits reçus de Dieu ; et en général il y avait quatre sortes de sacrifices qui étaient offerts à Dieu. Car tout sacrifice est une oblation, mais toute oblation n'est pas un sacrifice : car le sacrifice implique une action sacrée. Aussi, lorsqu'il n'y avait rien d'autre dans une oblation que ce qui revenait à l'usage du prêtre, ce n'était qu'une simple oblation ; mais lorsque quelque chose s'y ajoutait, par exemple ce qui était consumé, alors on l'appelait sacrifice. Or on accomplissait dans l'Ancien Testament un triple sacrifice. Le premier était appelé très digne, parce qu'on lui donnait le nom d'holocauste. Le deuxième était le sacrifice pour le péché. Le troisième s'appelait sacrifice d'immolation (victima), ou de paix (hostia pacificorum).
Et dans le premier sacrifice tout était brûlé ; et cet holocauste était très agréable à Dieu. Ce mot holocauste vient du grec ólon, qui signifie « tout », et de kaíô, qui signifie « consumer ».
Au sujet du sacrifice de paix (hostia pacificorum) pour le péché, une partie était brûlée, tandis que l'autre était cédée à l'usage du prêtre, mais rien ne revenait à l'usage de ceux qui offraient, car ils donnaient cette offrande pour leur péché ; excepté, éventuellement, dans deux cas : ou bien lorsqu'on offrait pour le péché du prêtre, dans ce cas tout était consumé, puisqu'il n'en restait rien. Semblablement quand on offrait pour tout le peuple, car il y avait aussi un prêtre parmi eux. Quant à la victime, elle était divisée en trois parties : car la première était offerte à Dieu, une autre était donnée aux prêtres, une autre était donnée à ceux qui offraient. Et le psalmiste fait allusion à tous ces sacrifices ici. Il fait mention du sacrifice de paix lorsqu'il dit : sacrifice. Il fait mention de la simple oblation quand il dit : et tu n'as pas voulu d'oblation. Il fait mention du sacrifice d'holocauste lorsqu'il dit : d'holocauste et de sacrifice pour le péché, autrement dit : tu m'as accordé beaucoup de bienfaits, et j'ai voulu te rendre, non cependant par des sacrifices ou d'autres choses du même genre ; car toi, tu n'en as pas voulu au temps de la Nouvelle Alliance, puisque à partir de ce moment la figure a cessé, et que les autres sacrifices étaient des figures du vrai sacrifice, à savoir du Christ. Et c'est pourquoi après le Christ le Temple fut détruit, et les sacrifices cessèrent. Et par conséquent même les Juifs gardent aujourd'hui peu de choses parmi ces rites, à savoir la circoncision comme valeur de signe. Ou bien : Tu n'as pas voulu, c'est-à-dire tu ne les as pas acceptés en soi au nombre des bonnes oeuvres que l'homme accomplit : car certaines choses sont acceptées par Dieu pour lui ; comme l'oeuvre de la justice, de la charité, de la foi et de la vertu ; et le livre du Deutéronome prescrit cela : « Maintenant, Israël, qu'est-ce que le Seigneur ton Dieu demande de toi, si ce n'est que tu craignes le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur et de toute ton âme ? » Mais il n'accepte pas les oblations pour lui : « Est-ce que je mangerai des chairs de taureaux ? ou boirai-je du sang des boucs ? » Non, mais quoi ? « Immole à Dieu un sacrifice de louange, et rends au Très-Haut tes voeux. »
Pourquoi donc furent-ils prescrits dans la Loi ?
Pour deux raisons : comme figure du sacrifice futur : « Toutes ces choses leur arrivaient en figure » ; et comme précaution, pour qu'ils n'offrent pas aux idoles ces sacrifices, car au contact des nations ils se détourneraient facilement de Dieu pour s'adonner à cette idolâtrie ; idolâtrie vers laquelle les enfants d'Israël étaient portés des le début de la Loi. Mais au livre de l'Exode on ne fait pas mention des sacrifices, si ce n'est qu'après être tombé le peuple adora un veau. Et il est écrit dans Jérémie : « Je n'ai point parlé à vos pères, je ne leur ai rien commandé au jour que je les ai tirés de la terre d'Ègypte, au sujet des holocaustes et des victimes. » On est loin du sacrifice de la nouvelle Alliance qui contient le Christ lui-même, lequel est en soi agréé par Dieu.
mais tu m'as parfaitement disposé les oreilles. Une autre version lit : corpus (corps). Et c'est ainsi que l'Apôtre dans son épître aux Hébreux introduit ce mot en disant : « Corpus autem aptasti mihi (Mais tu m'as façonné un corps). » Et cela signifie : tu as voulu l'autre sacrifice de la nouvelle Alliance, parce que cet autre sacrifice est venu. Car tu m'as donné un corps, afin de l'offrir en sacrifice saint. Ou bien : perfecisti (tu as parfait), c'est-à-dire tu m'as accordé un corps parfait sans tache. Ou bien : aptasti (tu as façonné), c'est-à-dire tu m'as uni. Ou bien : Aures perfecisti mihi (Tu m'as parfaitement disposé les oreilles). Ou bien : fodisti (tu as ouvert) ; et cela concorde avec les versets qui précèdent, car il veut que nous offrions davantage un sacrifice des lèvres, c'est-à-dire davantage celui des prédications des oeuvres divines que l'immolation des animaux. Et c'est pourquoi il dit : tu m'as parfaitement disposé les oreilles, autrement dit : tu exiges de moi ce que tu m'as principalement donné, à savoir la capacité de percevoir la sagesse. Et il exige cela afin que je manifeste la sagesse que nous avons reçue pour la faire connaître et la prêcher : « Le Seigneur Dieu m'a ouvert les oreilles. »
Et Tu n'as pas demandé, c'est-à-dire tu n'as pas accepté, d'holocauste et de sacrifice pour le péché. Ou bien : Tu n'as pas même demandé un sacrifice de paix (hostia) pour le péché : « Les holocaustes des béliers, et la graisse des [animaux] gras, et le sang des veaux et des agneaux et des boucs, je n'en veux point. » Mais, comme l'Ecriture le rapporte aussi, cet holocauste est parfois agréé par Dieu. Mais lorsqu'un holocauste est seulement un simple sacrifice, alors il équivaut à l'accomplissement de nos bonnes oeuvres. Mais si toutes les oeuvres sont faites pour Dieu, alors il s'agit d'un holocauste. Et si nous, nous gardons la continence pendant un certain temps, c'est un sacrifice ; si nous gardons la virginité, alors c'est un holocauste, parce que ce sont des oeuvres de perfection ; c'est pourquoi elles sont très agréées par Dieu.
b. 8 Alors, j'ai dit : « Voici, je viens. » Ici il justifie la cause de la prédication des oeuvres divines selon son point de vue, en montrant son intention.
- Et il montre d'abord son intention.
- Puis il montre que celle-ci est conforme à la volonté divine : En tête.
- On voudrait peut-être expliquer ces paroles en les rapportant à David, autrement dit continuer comme suit : Voici, je viens, en m'approchant spirituellement de toi, et en tête du livré, il est écrit de moi.
- « Je t'ai établi chef parmi les tribus d'Israël. » Mais puisque l'Apôtre explique cela en le rapportant au Christ, nous aussi, nous l'expliquons en le rapportant à lui. Et c'est pourquoi lorsqu'il dit : alors, il désigne la cause et la nécessité de la venue du Christ ; car tous les sacrifices de l'Ancien Testament n'étaient pas agréés par Dieu, car il est écrit dans l'épître aux Hébreux que « la loi n'a amené [personne] à la perfection ». Et « il est impossible que les péchés soient effacés par du sang de taureaux et de boucs ». Et c'est pourquoi il était nécessaire afin qu'advienne le vrai sacrifice, et qu'il soit manifesté. Et ainsi dit-il : Voici, je viens, à savoir par l'Incarnation. Et il dit : Voici, autrement dit je suis prêt à cause de la proximité : « Près de venir est son temps, et ses jours ne seront pas différés. » - « Excite ta puissance, et viens afin de nous sauver. »
- Et cette intention est conforme à la volonté divine ; aussi dit-il : En tête du livre. Le livre, c'est le Christ. Le livre, c'est l'instrument dans lequel sont écrits les projets (conceptiones) du coeur ; mais dans le Christ sont les projets de l'intelligence divine : « En lui tous les trésors de la sagesse et de la science sont cachés. » La tête du livre est Dieu le Père : « La tête du Christ [est] Dieu. » Donc en tête du livre, c'est-à-dire dans la volonté de Dieu le Père, il est écrit, à savoir prescrit « à mon sujet », que je viendrai. Ou bien autrement : il s'agit du livre de la prédestination qui est le livre de vie : « Qu'ils soient effacés du livre de vie », c'est-à-dire des vivants. Dans ce livre sont inscrits tous ceux qui doivent être sauvés, mais selon un ordre : car en tête de ce livre il est écrit Sauveur, et tous sont inscrits par lui : « Il les a prédestinés à être conformes à l'image de son Fils, afin qu'il fût lui-même le premier-né entre beaucoup de frères. » - « Il nous a élus en lui avant la fondation du monde, afin que nous fussions saints et sans tache en sa présence dans la charité » ; autrement dit : le Christ n'est pas inscrit comme les autres, mais en tête du livre. Ou bien en tête du livre des Psaumes, parce que le premier psaume a été écrit au sujet du Christ : « Bienheureux l'homme qui n'est pas allé au conseil des impies, etc. » Ainsi donc il montre son intention de venir. Ensuite il montre son intention d'obéir en tant qu'homme.
Or il y a principalement deux choses dans l'homme : La volonté et l'intelligence. La volonté de l'homme doit être soumise à la volonté divine, et l'intelligence doit être dirigée selon la loi de Dieu. Et c'est pourquoi il dit : ô mon Dieu, Père, en tant que Dieu. Ou bien : mon Dieu, en tant qu'homme, j'ai voulu [faire] ta volonté, qui est aussi ma volonté en tant que Dieu : « Que ma volonté ne se fasse pas, mais la tienne. » Semblablement mon intelligence est dirigée selon toi ; aussi dit-il : et ta loi au milieu de mon coeur Et il dit : au milieu, parce qu'il connaît parfaitement les raisons divines.
10 J'ai annoncé ta justice dans la grande assemblée ; voilà que je ne contiendrai pas mes lèvres, Seigneur, toi tu le sais. 11 Je n'ai pas caché ta justice dans mon coeur ; j'ai dit ta vérité et ton salut. Je n'ai pas caché ta miséricorde et ta vérité à un conseil nombreux.
3. Ici le psalmiste expose le mode de l'annonce. Nous devons donc annoncer trois choses à propos des réalités divines, à savoir les oeuvres de la justice, les dogmes de la vérité, et les bienfaits de la miséricorde divine ; et il dit qu'il a annoncé ces trois choses.
a. En premier lieu il dit qu'il a annoncé les oeuvres de la justice : J'ai annoncé ta justice, justice qu'il a annoncée ou prêchée de trois manières.
D'abord publiquement, puis avec promptitude, enfin avec pureté d'intention.
- Publiquement, lorsqu'il dit : dans la grande assemblée. Pareillement dans la réunion d'un grand nombre. - « J'ai parlé publiquement au monde. » Ou bien : dans la, grande assemblée, c'est-à-dire dans l'Eglise catholique, qui est grande par son pouvoir et sa fermeté : « Les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle. » Et elle est grande par sa diffusion : « Depuis le lever du soleil jusqu'à son coucher, grand est ton nom parmi les nations. »
- Avec promptitude, lorsqu'il dit : voilà que je ne contiendrai pas mes lèvres, autrement dit : Je ne céderai pas à ceux qui m'interdisent de parler : « Donne à tes serviteurs d'annoncer ta parole en toute confiance. »
- Avec pureté d'intention, lorsqu'il dit : toi tu le sais, c'est-à-dire tu as approuvé mon intention « Toi, tu sais tout leur dessein de mort contre moi. » Ou bien, toi, tu le sais, c'est-à-dire tu as prédestiné de toute éternité en ce qui concerne le Christ, lorsqu'il dit : Je n'ai pas caché ta justice dans mon coeur.
b. Il confesse les dogmes de la vérité, lorsqu'il dit : j'ai dit ta vérité. Le Christ a confessé cette vérité devant Pilate : « Si je suis né et si je suis venu dans le monde, c'est pour rendre témoignage à la vérité. »
- « Ma bouche s'exercera à la vérité. » Et j'ai dit ton salut, parce que par la confession de la vérité le salut parvient à l'homme : « Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. »
c. Il reconnaît les bienfaits de la miséricorde divine, lorsqu'il dit : Je n'ai pas caché ta miséricorde et ta vérité ; parce que la miséricorde et la vérité vont de pair ; et c'est pourquoi il dit : vérité. Il ne met pas ici le mot vérité pour signifier la vérité de la doctrine, mais la vérité de la justice dans les promesses : Car Dieu est véridique. Et la vérité de Dieu consiste en ce qu'il donne ce qu'il promet, car il n'a pas d'autre dette envers nous que sa promesse.
12 Mais toi, Seigneur, n'éloigné pas de moi les effets de ta miséricorde : Ta miséricorde et ta vérité toujours m'ont soutenu. 13 Parce que des maux sans nombre m'ont environné né ; mes iniquités m'ont saisi, et je n'ai pu en soutenir la vue. Elles se sont multipliées plus que les cheveux de ma tête ; et mon coeur m'a abandonné.
II. Plus haut le psalmiste a fait mémoire de la confiance qui lui vient de Dieu quant aux bienfaits passés ; mais ici il expose la confiance qui lui vient de Dieu quant aux bienfaits futurs, et il l'exprime par la prière. À ce propos il fait deux choses.
A) Il expose d'abord sa prière en général.
B) Puis en particulier : 14 Qu'il te plaise.
A. En parlant de la prière en général il fait deux choses.
1) Il formule d'abord sa demande.
2) Puis il en justifie la raison : Ta miséricorde.
1. Ainsi dit-il : J'ai annoncé ta justice [...]. Mais toi, Seigneur, n'éloigne pas de moi les effets de ta miséricorde. Certains reçoivent déjà les effets de la miséricorde, à savoir ceux qui jouissent de sa grâce et de sa gloire : « La terre est remplie de la miséricorde du Seigneur. » D'autres en sont proches, et ce sont ceux qui ne font pas obstacle à la miséricorde, au contraire ils ont un certain mérite : « Le Seigneur est proche de tous ceux qui l'invoquent. » Il y en a d'autres chez lesquels réside un obstacle, aussi les effets de la miséricorde sont-ils loin de ces derniers. Et c'est pourquoi je demande que les effets de ta miséricorde ne soient pas éloignés de moi à cause de mes démérites.
2. Et la raison de cette demande est double.
a. L'une est due à la confiance qui est née de l'expérience de la bonté divine ; l'autre est due à la contrainte qu'il souffre. Il y a deux manières selon lesquelles Dieu vient à notre secours : par sa miséricorde, en tant qu'il nous prodigue des bienfaits qu'il n'a même pas promis : « Le Christ Jésus a été le ministre de la circoncision pour montrer la véracité de Dieu, afin d'accomplir les promesses faites aux patriarches, et afin que les nations glorifient Dieu pour sa miséricorde » ; et par sa vérité, afin que nous ayons confiance. Et ce n'est pas comme si nous attirions Dieu à nous par nos propres mérites, mais c'est Dieu qui par ces mérites nous attire et nous a attirés. Et c'est pourquoi il dit : Ta miséricorde et ta vérité toujours m'ont soutenu.
b. L'autre raison est la contrainte exercée par les méchants. Et il expose deux sortes de maux ; les uns sont infligés de l'extérieur, les autres de l'intérieur : m'ont saisi. En parlant des maux extérieurs il dit : Parce que des maux sans nombre m'ont environné : ce sont les maux qui me sont infligés et par le monde, et par mes ennemis : « Ils m'ont environné comme des abeilles » ; et il dit : sans nombre, parce que les dangers dans le monde sont infinis, et les hommes méchants infinis également : « Infini est le nombre des insensés. » Les maux intérieurs sont les péchés : et ces maux sont dangereux pour deux raisons : à cause de leur gravité, car mes iniquités m'ont saisi, c'est-à-dire mes péchés m'ont lié par leur poids : « Ses iniquités saisissent l'impie. » et je n'ai pu en soutenir la vue. - « Leur malice les a aveuglés. » - « Vos iniquités ont mis une séparation entre vous et votre Dieu. » Semblablement, ils sont dangereux à cause de leur multitude. Aussi dit-il : Elles se sont multipliées plus que les cheveux de ma tête. Car de même que les cheveux sont innombrables, ainsi les péchés sont innombrables, et surtout les péchés véniels : et si ces derniers n'effraient pas à cause de leur poids, ils effraient à cause de leur multitude. La Glose commente : « Si tu as évité des péchés graves, prends garde de ne pas être écrasé par le sable ». Non point parce que des péchés véniels, quels qu'ils soient ou de quelque manière qu'ils soient commis, fassent un péché mortel, mais parce qu'ils y disposent : « Nous commettons tous des offenses de bien des manières. » L'effet de cet état peccamineux est la distraction du coeur : « Les mouches mortes gâtent la suavité d'un parfum. » Et c'est pourquoi il dit : et mon coeur m'a abandonné, autrement dit : s'ils n'ôtent pas la charité, ils empêchent cependant la ferveur, et le coeur est distrait si bien qu'il n'est pas fervent : « Ton serviteur a trouvé son coeur pour t'adresser cette prière. » Ou bien : mon coeur m'a abandonné, c'est-à-dire n'a pas pensé aux choses qui sont utiles à mon bien : « La lumière de mes yeux, elle-même n'est plus avec moi. »
14 Qu'il te plaise, Seigneur, de me délivrer ; Seigneur, regarde afin de m'aider. 15 Qu'ils soient confondus et qu'ils soient couverts de crainte tous ensemble, ceux qui cherchent mon âme, pour me la ravir. Qu'ils soient rejetés en arrière et qu'ils rougissent de honte ceux qui me veulent des maux. 16 Qu'ils portent promptement leur confusion, ceux qui me disent : « C'est bien fait, c'est bien fait ! » 17 Qu'ils exultent et soient dans l'allégresse à ton sujet, tous ceux qui te cherchent ; et qu'ils disent sans cesse : « Que le Seigneur soit magnifié ! » ceux qui aiment ton salut.
B. Ici le psalmiste expose sa prière de manière explicite.
1) Et il commence par expliciter la prière qu'il adresse pour lui-même.
2) Puis celle qu'il fait à l'égard des méchants : 15 Qu'ils soient confondus.
3) Enfin celle qu'il fait à l'égard des bons : 17 Qu'ils exultent et soient dans l'allégresse.
1. Pour lui-même il demande d'être délivré des méchants : « Tu délivres, Seigneur, ceux qui t'attendent avec patience. » Et il demande d'être aidé pour atteindre les biens ; car par ta providence le secours m'est donné. Et ce secours n'est pas dû à mon mérite, mais à ton bon plaisir. Aussi dit-il : Qu'il te plaise. En ce qui concerne ses adversaires, la condition de leurs personnes est désignée lorsqu'il dit : de me délivrer, c'est-à-dire des choses mauvaises, ou des hommes mauvais, ou des péchés. Et remarquez qu'il dit : Qu'il te plaise, ne désespérant pas de la miséricorde de Dieu ; autrement dit : si tu veux, tu peux ; et c'est pourquoi il dit : regarde afin de m'aider, dans la pratique du bien ; autrement dit : regarde ceux qui se repentent dans leur douleur. Le regard de Dieu est notre secours.
2. Qu'ils soient confondus. Ici il expose la confusion de ses adversaires : certains d'entre eux sont mortels, et cherchent à tuer. D'autres ne cherchent pas à tuer, mais à blesser. Il y en a d'autres encore qui cherchent à railler par des paroles, ou à tromper. Et ces trois genres de méchants sont désignés ici. Et on peut rapporter cela soit au bien, soit au mal, en ce sens qu'il y a une double confusion : une bonne confusion qui vient de la pénitence : « Quel fruit avez-vous donc tiré alors des choses dont vous rougissez maintenant ? » L'autre confusion vient du châtiment. Donc lorsqu'il dit : Qu'ils soient confondus, cela veut dire : Qu'ils soient punis. Et il fait cette prière en se conformant à la volonté divine, ou à la justice. Ou bien :Qu'ils soient confondus, c'est-à-dire qu'ils fassent pénitence, et qu'ils soient couverts de crainte tous ensemble ; soit de la crainte des châtiments, et en relation avec cette première interprétation l'Ecriture dit : « Comme la méchanceté est timide, elle donne un témoignage de condamnation »contre elle » ; soit de la crainte qui invite à la pénitence. Et cela, parce qu'ils cherchent mon âme, afin de tuer corporellement ma vie. Ou bien, « les âmes », afin de les entraîner dans les ténèbres : « Donne-moi les âmes, et prends le reste pour toi. » Il demande que ses ennemis matériels soient empêchés ; aussi dit-il : Qu'ils soient rejetés en arrière, vers le bien, c'est-à-dire qu'ils se mettent à la suite du Christ. Ou bien vers le mal, c'est-à-dire qu'ils essuient un échec dans leur intention, afin qu'ils y renoncent. et qu'ils rougissent de honte ceux qui me veulent des maux, c'est-à-dire ceux qui se réjouissent de mes maux : « Tous mes ennemis ont appris mon malheur ; ils se sont réjouis, parce que c'est toi qui l'as fait. » Contre ces trois ennemis il demande à Dieu de hâter son secours, car le retard est habituellement nuisible : « Parce que la sentence n'est pas portée promptement contre les méchants, les fils des hommes, sans aucune crainte, commettent le mal. » Et c'est pourquoi il dit : Qu'ils portent promptement leur confusion, c'est-à-dire qu'ils soient aussitôt confondus, parce que ces derniers sont ceux qui dans leur applaudissement me disent : « C'est bien fait, c'est bien fait ! », c'est-à-dire qui se réjouissent d'une manière mensongère dans leurs flatteries. Ou bien : C'est bien fait, c'est-à-dire ceux qui se moquent, ou insultent. La version iuxta Hebraeos de Jérôme lit ainsi ces paroles : « Vah (Ah !) » ; c'est de cette manière que les Juifs se moquaient du Christ.
3. Pour les bons, il demande qu'ils se réjouissent de son secours et de sa libération, et qu'ils louent Dieu. Et en relation avec sa première demande il dit : Qu'ils exultent et soient dans l'allégresse à ton sujet, tous ceux qui te cherchent. En relation avec sa seconde demande il dit : qu'ils disent sans cesse : « Que le Seigneur soit magnifié ! » ceux qui aiment ton salut. Il mentionne ici quatre dispositions qui conviennent aux bons :
a. D'abord, qu'ils préfèrent le salut de Dieu, qui est le Christ : « Mes yeux ont vu ton salut. »
b. Ensuite, qu'ils cherchent des actes de charité : « Sur ma couche, pendant les nuits, j'ai cherché celui que chérit mon âme. » - « Cherchez le Seigneur, tandis qu'on peut le trouver. »
c. Puis, qu'ils se réjouissent d'avoir trouvé le bien-aimé ; aussi dit-il : Qu'ils exultent. - « Mais moi, je me réjouirai dans le Seigneur, et j'exulterai en Dieu mon Jésus. » On parle d'exultation dans la mesure où il s'agit de signes extérieurs d'allégresse ; mais on parle de joie par rapport aux choses intérieures, comme s'il s'agissait d'une allégresse et d'une dilatation du coeur.
d. Enfin, l'action de grâce et la louange ; aussi dit-il : et qu'ils disent sans cesse : « Que le Seigneur soit magnifié ! » ceux qui aiment ton salut. - « Exulte et loue, habitation de Sion, parce que grand est au milieu de toi le saint d'Israël. »
18 Pour moi, je suis un mendiant et un pauvre : [mais] le Seigneur prend soin de moi. Toi, tu es mon aide et mon protecteur : mon Dieu, ne tarde pas.
Ici [le psalmiste] expose la cause de sa demande. Et il mentionne d'abord son indigence ; puis il expose le secours de Dieu face à celle-ci.
Ainsi dit-il : je demande toutes choses, parce que par moi-même je ne puis faire quoi que ce soit, parce que je suis un mendiant. On peut expliquer cela de deux manières. Selon une première manière, au sens littéral, en l'appliquant au Christ dans sa personne, lui qui a vécu dans ce monde et qui fut mendiant et pauvre : « Vous connaissez la libéralité de notre Seigneur Jésus-Christ, qui pour vous s'est fait pauvre, de riche qu'il était, afin de vous enrichir par sa pauvreté. » On appelle mendiant celui qui cherche à obtenir d'autrui sa nourriture ; mais on appelle pauvre, celui qui ne se suffit pas à lui-même. Et ces deux conditions sont mentionnées à propos du Christ : « Le Fils de l'homme n'a pas où reposer la tête. » Ou bien, au sens spirituel, je dois nécessairement mendier auprès de Dieu le secours de sa grâce, et je suis un pauvre, car ce que je possède ne me suffit pas. Et ainsi, parce que je reconnais cela, le Seigneur prend soin de moi. Et parce que je suis dans l'indigence, Toi, Seigneur, tu es mon aide. Et à cause du danger, ne tarde pas. - « Seigneur, viens à mon aide ! »