1 Juge-moi, ô Dieu, et discerne ma cause d'une nation qui n'est pas sainte ; délivre-moi de l'homme inique et trompeur. 2 Car toi tu es ma force, ô Dieu ; pourquoi m'as-tu repoussé, et pourquoi dois-je marcher attristé, pendant que l'ennemi m'afflige ?
3 Envoie ta lumière et ta vérité : elles me conduiront et m'amèneront à ta montagne sainte et dans tes tabernacles. 4a Et j'irai à l'autel de Dieu, vers Dieu qui réjouit ma jeunesse. 4b Je te louerai sur la cithare, ô Dieu, mon Dieu. 5 Pourquoi es-tu triste, mon à me, et pourquoi me troubles-tu ? Espère en Dieu, parce que je le louerai encore, lui, le salut de mon visage et mon Dieu.
1 Juge-moi, ô Dieu, et discerne ma cause d'une nation qui n'est pas sainte ; délivre-moi de l'homme inique et trompeur. 2 Car tu es ma force, ô Dieu ; pourquoi m'as-tu repoussé, et pourquoi dois-je marcher attristé, pendant que l'ennemi m'afflige ?
Dans le psaume précédent David a fait connaître son désir, mais ici il a recours à la prière afin d'accomplir son désir.
I) Et à cette fin il expose d'abord sa prière.
Il) Ensuite son effet : 4b Je te louerai.
I. Il commence donc par exposer :
A) Sa prière en général.
B) Puis en particulier : de l'homme inique.
A. Ainsi demande-t-il d'abord le jugement, ensuite l'effet du jugement. Il demande donc en disant : Juge-moi, ô Dieu.
Mais il semble que cette demande soit présomptueuse, car lui-même dit : « N'entre pas en jugement. »
On répondra en disant qu'il y a deux sortes de jugement : un jugement de sévérité, et un jugement de miséricorde ou d'équité.
Le premier s'exerce quand on considère uniquement la nature de l'objet et non la condition de la personne : ce jugement doit être craint. Il dit à ce sujet : « N'entre pas en jugement. » Car nos justices ne sont rien en présence de Dieu, comme le dit Isaïe. Et ce « jugement est sans miséricorde », selon Jacques.
Le second s'exerce en considérant non seulement la nature du fait condamnable, mais la condition de la personne : « Le Seigneur a compassion de ceux qui le craignent, car il sait de quoi nous sommes faits. » Et le psalmiste demande ce jugement-là . Ou bien encore, il y a deux sortes de jugement : un jugement de discussion, lorsque les mérites sont discutés, mais cela il ne le demande pas ici, car la discussion est à craindre : « Je redoute toutes mes oeuvres, sachant que tu ne me tiendras pas pour innocent. » L'autre est un jugement de discernement, c'est-à-dire de séparation à l'égard des méchants, et c'est ce jugement qu'il demande ; aussi ajoute-t-il : discerne ma cause. Et cela se rapporte à l'état présent ; ainsi nous demandons à être séparés des méchants, et si ce n'est pas dans le lieu, au moins dans la cause. En effet, beaucoup de choses sont communes entre eux et nous, parce que le lieu est dû au hasard mais non la cause, car les bons et les méchants usent des mêmes choses de manière différente ; car dans l'adversité, les bons brillent par la patience, tandis que les méchants fument d'impatience. Mais si nous nous référons au jugement futur, nous demandons qu'il y ait un discernement : car la cause des méchants sera jugée en vue de leur condamnation, celle des bons en vue de leur salut.
B. Mais il demande en particulier d'être jugé quant à deux choses : quant a sa libération du mal et quant à son progrès dans le bien.
1. Il demande donc d'être libéré du mal, ou présent ou futur, aussi dit-il : délivre-moi de l'homme inique et trompeur. L'homme inique c'est le diable : « C'est un ennemi qui a fait cela. » Ou bien un autre homme séducteur, ou n'importe quel injuste. Et on appelle inique celui qui s'applique ouvertement à l'injustice, mais trompeur celui dont la fraude est cachée : « La ruse est dans le coeur de ceux qui méditent le mal. » On est donc libéré doublement de ces hommes iniques. D'abord, afin de n'être pas séduit par la ruse cachée. Ensuite, afin de ne pas être opprimé par l'adversité : Car toi tu es ma force, ô Dieu. Ici est donnée la raison de cette libération, et elle est double : la première vient de Dieu qui peut libérer, aussi dit-il : toi tu es ma force. - « Seigneur tu es ma force et ma louange. » Et on l'appelle notre force de manière effective parce qu'elle vient de lui-même : « Il donne de la force à celui qui est fatigué, et redouble la vigueur de ceux qui sont défaillants. » La seconde raison vient. de l'homme, c'est-à-dire des maux qu'il souffre. Nous endurons certains maux selon notre jugement, car lorsque nous sommes dans les adversités, nous nous voyons rejetés de Dieu ; aussi dit-il : pourquoi m'as-tu repoussé ? Mais « le Seigneur ne rejette pas son peuple ». Et c'est ainsi que ce mal est seulement envisagé de manière subjective. Mais autre est la vérité, d'où ce qui suit : pourquoi dois-je marcher attristé ? c'est-à-dire triste, de la tristesse du siècle qui opère la mort ; et tel est le sens de : pourquoi dois-je marcher attristé ? c'est-à-dire temporellement, pendant que l'ennemi m'afflige, c'est-à-dire l'homme mauvais, temporellement. Ou bien : triste, de la bonne tristesse qui opère la pénitence en vue du salut. Et tel est uniquement le sens de : pourquoi dois-je marcher attristé ? car la joie doit aussi être associée à la pénitence.
3 Envoie ta lumière et ta vérité : elles me conduiront et m'amèneront à ta montagne sainte et dans tes tabernacles. 4a Et j'irai a l'autel de Dieu, vers Dieu qui réjouit ma jeunesse. 4b Je te louerai sur la cithare, ô Dieu, mon Dieu. 5 Pourquoi es-tu triste, mon à me, et pourquoi me troubles-tu ? Espère en Dieu, parce que je le louerai encore, lui, le salut de mon visage et mon Dieu.
2. Ici il expose son progrès dans le bien.
a) Et il commence par demander les biens divins au moyen desquels on progresse.
b) Puis il demande de progresser par ces biens.
a. Il demande deux biens : la lumière et la vérité. On parvient à Dieu par les souffrances de l'âme, et par la connaissance : « L'entrée [dans le repos] est promise à ceux qui croient. » Deux choses sont nécessaires à la connaissance : la lumière et l'objet à connaître : « Tout ce qui est manifesté est lumière. » Et c'est pourquoi il demande deux choses : la lumière et la vérité, biens auxquels je ne puis accéder par moi-même. Aussi dit-il : Envoie ta lumière et ta vérité. Ici lumière et vérité sont une même chose, car elles sont prises pour le Christ. Envoie ta lumière, c'est-à-dire le Christ : « Il était la lumière, la vraie, qui illumine tout homme venant en ce monde », et [la] vérité. - « Moi je suis le chemin et la vérité », car le Christ est lui-même la vérité et la vie, autrement dit : Dieu le Père envoie le Christ. Ou bien, lumière est pris ici dans le sens de la loi, car « le commandement [du Seigneur] est une lampe, et [sa] loi une lumière. » Et la vérité, c'est le Nouveau Testament.
b. Ensuite il expose son progrès dans le bien. Et il commence par donner la direction pour y parvenir : elles me conduiront, c'est-à-dire ta lumière et la vérité me conduiront vers toi. Ou bien : elles me conduiront, c'est-à-dire m'arracheront aux méchants, et m'amèneront à ta montagne sainte et dans tes tabernacles. Cette prière répond au désir exprimé dans le psaume précédent : « Je passerai dans le lieu du tabernacle admirable, jusqu'à la maison de Dieu. » Et parce que cela ne suffit pas encore, je demande d'être amené par Dieu à la montagne, etc. Jérusalem était au pied de la montagne du côté de l'Aquilon. Et ainsi ceux qui s'y rendaient parvenaient d'abord à la montagne. Ensuite ils allaient vers l'habitation. Enfin ils s'acheminaient vers le lieu du sacrifice, c'est-à-dire vers l'autel. Et là encore mon esprit ne se repose pas, mais il monte vers Dieu ; et c'est pourquoi il dit : m'amèneront à ta montagne sainte et dans tes tabernacles, c'est-à-dire vers ton habitation. Et là encore mon esprit ne se repose pas en cet endroit, mais il va vers la maison de Dieu, c'est-à-dire vers l'autel. Aussi dit-il : j'irai [vers] l'autel de Dieu. Et là encore il ne s'y repose pas de peur de paraître idolâtre, mais il va vers Dieu qui réjouit [sa] jeunesse. Au sens mystique les mots [sur la] montagne et dans [ton] tabernacle désignent l'Église présente, ou bien l'Église céleste ; autrement dit : ils me mèneront vers ton Église : « La montagne de la maison du Seigneur sera établie au sommet des montagnes. » Et vers tes tabernacles, c'est-à-dire les diversités des saints qui sont « des voyageurs sur la terre ». Et cette Église est appelée porte du ciel : « Ce n'est rien moins que la maison de Dieu, et la porte du ciel. » Et c'est pourquoi il est également appelé autel de Dieu, c'est-à-dire Dieu lui-même : « Dieu en est le temple » ; car tous les sacrifices spirituels doivent être offerts à Dieu, non à une créature humaine. Et là sera la joie : « Vous verrez, et votre coeur se réjouira » - « Entre dans la joie de ton maître. » Et voilà pourquoi il dit qui réjouit ma jeunesse, c'est-à-dire là il y aura la rénovation et la jeunesse, car il est écrit : « Tous nous apparaîtrons à l'état d'homme parfait, à la mesure de l'âge et de la plénitude du Christ », et c'est pourquoi il dit : ma jeunesse. - « Ta jeunesse se renouvellera comme celle de l'aigle. » Et les prêtres disent ce psaume lorsqu'ils s'avancent vers l'autel ; car ces deux choses, c'est-à-dire la joie et la rénovation, sont nécessaires à ceux qui veulent s'approcher de l'autel céleste : « Comment aurais-je pu manger de cette hostie, ou plaire au Seigneur dans ces cérémonies, avec un esprit plein d'affliction ? » De même au ciel il n'y a pas la vétusté du péché : « Je vous écris, jeunes gens. » Ou bien tout ce qui est dit se rapporte à la Patrie céleste dans laquelle nous devons fixer notre désir et vers laquelle nous devons nous acheminer avec ardeur ; et il désigne cela lorsqu'il dit : à ta montagne sainte. - « Tu les introduiras et tu les établiras, Seigneur, sur la montagne de ton héritage », car là est la stabilité parfaite. Et de même, là se trouve l'assemblée des saints ; aussi dit-il : et dans tes tabernacles. - « Que tes tabernacles sont beaux, ô Jacob, et tes tentes, ô Israël ! » - « Que tes demeures sont aimables, Seigneur des armées ! » Et on les appelle tabernacles, car bien que les hommes soient citoyens des cieux selon la grâce, ils sont cependant là en tant qu'hôtes selon la condition de la nature humaine. Enfin l'autel signifie l'humanité du Christ : « Ils regarderont le roi dans sa beauté. » Et le Christ est appelé autel de Dieu : « Nous avons un autel auquel n'ont pas le droit de manger ceux qui restent au service du tabernacle » ; car de même que tous les sacrifices charnels étaient offerts sur l'autel, ainsi toutes les prières sont offertes par le Christ. C'est pourquoi toute oraison se termine par : « Per Christum Dominum nostrum (Par le Christ notre Seigneur). » Mais parce que le repos n'est pas dans l'humanité du Seigneur, il se dirige plus loin, vers la divinité ; aussi dit-il : vers Dieu. - « Tu feras tes délices du Tout-Puissant, et tu lèveras vers Dieu ton visage. »
II. L'effet de la prière est la confession de la louange ; aussi dit-il : Je te louerai sur la cithare, ô Dieu, et il dit cela en raison de son sentiment, car il est écrit : « On y trouvera la joie et l'allégresse. » Et il dit : sur la cithare, à la différence du psaltérion, car le psaltérion donne un son aigu, tandis que la cithare donne un son grave ; d'où, Je te louerai sur la cithare, car nous sommes libérés des maux du monde. Et sur le psaltérion, car nous avons acquis ces joies célestes. Pourquoi es-tu triste, etc. Tout ce qui suit a été commenté plus haut, au psaume précédent.