1 Pour la fin, aux fils de Coré pour l'intelligence.
2 Ô Dieu, nous avons entendu de nos oreilles ; nos pères nous ont annoncé l'oeuvre que tu as opérée en leurs jours et dans les jours anciens. 3 Ta main a exterminé des nations et tu as planté [nos pères à leur place] ; tu as affligé des peuples et tu les as chassés. 4 Car ce n'est point par leur glaive qu'ils se sont mis en possession d'une terre, et ce n'est point leur bras qui les a sauvés ; mais ta droite, et ton bras, et la lumière de ton visage, parce que tu t'es complu en eux.
5 C'est toi qui es mon roi et mon Dieu : c'est toi qui décrètes les saluts de Jacob. 6 Avec toi, nous dissiperons nos ennemis avec la corne, et en ton nom, nous mépriserons ceux qui s'élèvent contre nous.
7 Car ce n'est pas en mon arc que j'espérerai, et mon glaive ne me sauvera pas. 8 Car tu nous as sauvés de ceux qui nous affligeaient, et tu as confondu ceux qui nous haïssaient.
9 C'est en Dieu que nous serons loués tout le jour ; et c'est ton nom que nous confesserons à jamais.
10 Mais maintenant tu nous as repoussés et confondus, et tu ne sortiras pas, ô Dieu, avec nos armées.
11 Tu nous as fait tourner le dos à nos ennemis, et ceux qui nous haïssent pillaient pour eux. 12 Tu nous as livrés comme des brebis que l'on mange, et tu nous as dispersés parmi les nations. 13 Tu as vendu ton peuple sans en recevoir le prix ; et il n'y a pas eu une multitude [d'acheteurs] dans leurs échanges.
14 Tu nous as rendus un sujet d'opprobre à nos voisins, un objet de grimace et de dérision pour ceux qui sont autour de nous. 15 Tu nous
as faits la fable des nations et le hochement de tête des peuples.
16 Tout le jour ma honte est devant moi, et la confusion de ma face m'a couvert, 17 à la voix de celui qui m'adresse des reproches et qui m'invective, à la face de mon ennemi et de celui qui me persécute.
18 Tous ces [maux] sont venus sur nous et nous ne t'avons pas oublié, et nous n'avons pas iniquement agi contre ton alliance. 19 Et notre coeur ne s'est pas retiré en arrière ; et tu as détourné nos sentiers de ta voie.
20 Parce que tu nous as humiliés dans un lieu d'affliction, et l'ombre de la mort nous a enveloppés. 21 Si nous avons oublié le nom de notre Dieu, et si nous avons étendu nos mains vers un dieu étranger ; 22 est-ce que Dieu ne s'en enquerra pas ? car il connaît, lui, les choses cachées du coeur. Puisque, à cause de toi, nous sommes mis à mort tout le jour ; nous sommes regardés comme des brebis de tuerie.
23 Lève-toi, pourquoi dors-tu Seigneur ? Lève-toi, et ne nous rejette pas jusqu'à la fin. 24 Pourquoi détournes-tu ta face, oublies-tu notre misère et notre tribulation ? 25 Car notre âme est humiliée dans la poussière, et notre ventre est collé à la terre. 26 Lève-toi, Seigneur, aide-nous, et rachète-nous à cause de ton nom.
1 Pour la fin, aux fils de Coré pour l'intelligence.
2 Ô Dieu, nous avons entendu de nos oreilles ; nos pères nous ont annoncé l'oeuvre que tu as opérée en leurs jours et dans les jours anciens. 3 Ta main a exterminé des nations et tu as planté [nos pères à leur place] ; tu as affligé des peuples et tu les as chassés. 4 Car ce n'est point par leur glaive qu'ils se sont mis en possession d'une terre, et ce n'est point leur bras qui les a sauvés ; mais ta droite, et ton bras, et la lumière de ton visage, parce que tu t'es complu en eux.
Plus haut le psalmiste a montré son désir à l'égard de Dieu ; mais ici il en vient à prier face à l'affliction de tout le peuple. Ce psaume est intitulé : « In finem, filiis Core ad intellectum (Pour la fin, aux fils de Coré pour l'intelligence). » Les fils de Coré sont les fils de la Passion du Christ ; et ces derniers sont à proprement parler des martyrs, parce qu'ils imitent le Christ : « Le Christ a souffert pour nous, vous laissant un exemple, afin que vous suiviez ses traces ». Et c'est pourquoi il convient spécialement aux martyrs. Il est vrai que tous les biens, temporels et spirituels, sont donnés par Dieu. Les temporels sont des biens plus modestes, tandis que les spirituels sont plus importants. Un père donne à ses petits enfants des biens modestes, mais aux adultes il donne de grands biens. Et ainsi fait Dieu : car lorsque les hommes étaient dans la condition de petits enfants, il leur donna des biens modestes, c'est-à-dire temporels, comme on le voit dans l'Ancien Testament : « Ils étaient comme des petits enfants sous le pédagogue », c'est-à-dire sous les observances de la Loi. Il est écrit dans Isaïe : « Si vous voulez, et que vous m'écoutiez, vous mangerez les biens de la terre » ; mais à ceux qui sont à présent parfaits dans le Nouveau Testament, ce ne sont pas les biens temporels qui sont promis, mais de dures afflictions ; et cela dans l'espérance des réalités spirituelles : « Vous serez heureux lorsque les hommes vous haïront, vous éloigneront, vous injurieront, et rejetteront votre nom comme mauvais, à cause du Fils de l'homme. » Et ainsi l'intention du psalmiste est-elle de soustraire d'abord les hommes du Nouveau Testament à l'appétit de la prospérité terrestre promise dans l'Ancien Testament.
Ce psaume se divise en trois parties.
I) Dans la première partie il est question de la prospérité passée.
II) Dans la deuxième partie, de l'adversité présente : 10 Mais maintenant tu nous as repoussés.
III) Dans la troisième partie, le secours est demandé face à ces adversités : 23 Lève-toi.
I. En parlant de la prospérité passée il fait deux choses :
A) Il énumère d'abord les bienfaits prodigués aux anciens.
B) Puis il montre qu'il a l'espérance de recevoir des biens plus grands : 5 C'est toi qui es mon roi.
A. En énumérant les bienfaits prodigués aux anciens il fait trois choses :
1) Il commence par parler de l'écoute des bienfaits.
2) Puis du temps : l'oeuvre que tu as opérée en leurs jours.
3) Enfin il expose le bienfait lui-même : Ta main.
1. À propos de l'écoute des bienfaits il fait :
a) D'abord connaître la manière d'entendre.
b) Puis qui ils ont entendu.
a. Il commence par mentionner l'invocation du nom divin, lorsqu'il dit : Ô Dieu. Et ainsi ce psaume débute sous la forme d'une prière, qui est une élévation de l'intelligence vers Dieu. Ou bien le psalmiste traite dans ce psaume de choses relatives à la prospérité et à l'adversité. Dans l'adversité l'homme a recours à Dieu, comme à l'égard d'un défenseur : « Lorsque j'étais dans la tribulation, vers le Seigneur j'ai crié et il m'a exaucé. » Dans la prospérité il invoque Dieu avec joie : « Comme celui qui est assoiffé s'avance avec joie vers une fontaine. »
nous avons entendu. L'écoute est nécessaire pour acquérir la sagesse : « Si tu aimes à écouter, tu seras sage », et elle est aussi nécessaire au sage : « Le sage, en écoutant, sera plus sage. » Semblablement elle est nécessaire à tout homme ; car personne n'est capable de penser à tout ce qui concerne la sagesse, et c'est pourquoi personne n'est sage sans être enseigné par autrui : car s'il entend de bonnes choses, il est aidé en les recevant ; mais s'il entend de mauvaises choses, il est aidé en reconnaissant les choses meilleures.
de nos oreilles. Il entend de ses propres oreilles, celui qui entend avec les oreilles soumises à la raison. C'est pourquoi on dit de quelqu'un qu'il est homme dans la mesure où il a la raison. Quand les oreilles sont soumises à la raison, elles sont humaines ; lorsqu'elles ne sont pas soumises à la raison, elles sont animales : « Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende », c'est-à-dire considère.
b. nos pères nous ont annoncé. Ici il montre ce qu'il a entendu de ceux qui ont voulu enseigner la vérité, puisque ce sont nos pères : « Interroge tes pères, et ils te le raconteront ; tes ancêtres, et ils te le diront. » Pareillement, ce qu'il a entendu de ceux qui ont pu enseigner la vérité, puisque ce sont nos anciens : « Dans les anciens est la sagesse. »
2. l'oeuvre que tu as opérée en leurs jours et dans les jours anciens. Ici il expose le temps où il a entendu ces choses. Certains bienfaits sont des bienfaits anciens qu'eux-mêmes ont vus ; aussi dit-il : et dans les jours anciens.
3. Ta main.
a) Ici il expose le bienfait lui-même.
b) Puis il expose l'ordonnance de ce bienfait.
a. Dans le bienfait, nous considérons l'oeuvre et le fruit de l'oeuvre. L'oeuvre de la puissance divine, c'est qu'elle chassa devant eux des nations, aussi dit-il : Ta main, c'est-à-dire ton pouvoir. Or, par les membres on désigne en Dieu l'action que nous accomplissons par eux-mêmes. Ta main a exterminé des nations, c'est-à-dire a détruit aussi matériellement celles qui habitaient dans la terre promise : « Disperse-les par ta puissance et fais-les déchoir, ô mon protecteur, ô Seigneur. »
Le fruit de l'oeuvre, c'est qu'eux-mêmes leur ont succédé : « Il en brisera une multitude innombrable, et il en plantera d'autres à leur place. » Voilà pourquoi il dit : Tu [les] as plantés. - « Tu les introduiras et les planteras sur la montagne de ton héritage, dans ta demeure inébranlable que tu as faite, Seigneur ; c'est ton sanctuaire, Seigneur, qu'ont affermi tes mains. » Ce qui est planté prend racine afin de produire du fruit : « Il a espéré qu'elle produirait des raisins et elle a produit des grappes sauvages. »
b. tu as affligé des peuples. Ici il expose le mode et l'ordonnance du bienfait : Car cette terre ne fut pas aussitôt détruite, autrement elle serait devenue inculte et les bêtes sauvages se seraient multipliées ; et c'est pourquoi il les détruisit peu à peu. D'où ce qu'il dit : tu as affligé des peuples, et par des guerres, et par des bêtes, et par des frelons : « J'envoyai devant vous des frelons. » - « Tu as envoyé, comme avant-coureurs de ton armée, des guêpes, afin qu'elles les exterminassent peu à peu. » et tu les as chassés. - « Il chassa de leur face des nations. »
Car ce n'est point par leur glaive qu'ils se sont mis en possession d'une terre. Le psalmiste expose ici la cause du bienfait.
- Et il écarte d'abord une cause conjecturée.
- Puis il expose la véritable cause.
- La cause conjecturée pourrait être la force du peuple, parce qu'il les aurait chassés ; et c'est pourquoi en écartant cela il dit : ce n'est point par leur glaive, etc. Double est la force de l'homme : l'une repose sur son expérience des armes ; et il écarte celle-ci en disant : ce n'est point par leur glaive qu'ils se sont mis en possession d'une terre. Il est écrit au livre de Judith : « Les enfants d'Israël n'ont pas de confiance dans la lance ni dans la flèche. » Et ce qui suit dans ce même livre : « Ils ont vaincu mais sans le glaive. » L'autre est sa puissance naturelle ; et il écarte celle-ci en disant : ce n'est point leur bras qui les a sauvés, c'est-à-dire leur pouvoir : « Un roi ne se sauve point par sa grande puissance, et un géant ne se sauvera point par la grandeur de sa force. » - « De peur qu'ils ne disent : "C'est notre main élevée, et non le Seigneur, qui a fait toutes ces choses." »
- Mais la véritable cause est due à Dieu ; aussi dit-il : mais ta droite, etc. Et il expose quatre choses : trois relatives à l'exécution de son action, la quatrième concerne son effet. Si un roi veut aider quelqu'un, il fait trois choses à son égard.
Il lui accorde d'abord sa faveur ; puis il lui procure son secours pour oeuvrer. Enfin il lui donne conseil en le dirigeant.
Ainsi Dieu fait-il à leur égard. Car il leur fut d'abord favorable, et il leur donna la prospérité ; et celle-ci est signifiée dans le mot droite : « Ta [main] droite, Seigneur, s'est signalée dans sa force ; ta droite, Seigneur, a frappé l'ennemi. » Semblablement il leur accorda son secours ; et cela est signifié dans le mot bras : « Il a déployé la force de son bras. » Enfin il les dirigea : et la lumière de ton visage, c'est-à-dire émanant directement de ta providence.
La quatrième chose concerne son effet : parce que tu t'es complu en eux, autrement dit : Pourquoi nous a-t-il prodigué ces bienfaits ? Est-ce à cause de nos mérites ? Non. - « Ne dis point en ton coeur, lorsque le Seigneur ton Dieu les aura détruits en ta présence : "C'est à cause de ma justice que le Seigneur m'a introduit dans cette terre pour la posséder, puisque c'est à cause de leurs impiétés que ces nations ont été détruites." » Mais ce fut à cause de la grâce de Dieu : « Parce que tel a été ton bon plaisir. »
5 C'est toi qui es mon roi et mon Dieu : c'est toi qui décrètes les saluts de Jacob. 6 Avec toi, nous dissiperons nos ennemis avec la corne, et en ton nom, nous mépriserons ceux qui s'élèvent contre nous.
B. Ici il expose l'espérance qu'il a d'obtenir un bienfait plus grand, laquelle naît de l'espérance de Dieu lui-même. Et c'est pourquoi il fait trois choses.
1) Il fait d'abord connaître la cause de l'espérance.
2) Puis il expose la confiance : 6 Avec toi, nous dissiperons nos ennemis.
3) Enfin l'action de grâce : 9 C'est en Dieu que nous serons loués tout le jour.
1. En faisant connaître la cause de l'espérance il fait trois choses.
a) Il expose d'abord l'immutabilité de Dieu.
b) Puis son gouvernement.
c) Enfin l'expérience du secours divin.
a. Il montre l'immutabilité de Dieu, car Dieu fit cette oeuvre pour nos pères, et il la renouvela à plusieurs reprises parce que sa puissance ne s'est pas amoindrie ; et c'est pourquoi il peut également accomplir des oeuvres plus grandes, aussi dit-il : C'est toi qui es mon roi et mon Dieu, toi qui n'es pas amoindri.
b. Semblablement, comme en ce temps-là, l'attention de l'homme se porte aussi vers toi, aussi dit-il : mon roi, toi qui me défends et me gouvernes, et mon Dieu, toi qui prends soin de moi : « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l'unique Seigneur. » Donc j'ai confiance en Dieu comme eux aussi ont eu confiance.
c. Pareillement, l'expérience du secours divin, car toi seul es celui qui sauve, aussi dit-il : qui décrètes les saluts de Jacob. Et il dit cela, parce qu'autrefois il sauvait par des intermédiaires, mais à présent il sauve lui-même : « Voici, c'est notre Dieu, celui-ci ; nous l'avons attendu et il nous sauvera. »
2. Avec toi, nous dissiperons nos ennemis avec la corne. Ici il expose la confiance qu'il a en Dieu.
a) Et il fait d'abord connaître ce qu'il espère.
b) Puis il montre ce qu'il attribue à Dieu.
c) Enfin il expose la cause de son espérance.
a. Il espère un secours face à ses ennemis, et il en a deux pour s'opposer à ces derniers ; le premier est de vaincre l'ennemi ; et à ce propos il dit : Avec toi, c'est-à-dire par ta puissance, non par la nôtre, nous dissiperons avec la corne, c'est-à-dire nos ennemis, soit dans le présent, soit dans le futur. Et il dit : avec la corne, en usant d'une comparaison, parce que la force combative du boeuf est dans sa corne. Et il dit : nous dissiperons, parce que sur l'aire les pailles sont séparées du blé, comme au jugement dernier les méchants seront emportés, et les bons resteront. L'autre secours est qu'il ne soit pas vaincu par l'ennemi ; et en parlant de cela il dit : en ton nom, nous mépriserons ceux qui s'élèvent contre nous, c'est-à-dire nous mépriserons par ta puissance tous nos ennemis dans le futur, ou dans le présent, parce qu'ils n'ont pu nous nuire en aucune manière.
7 Car ce n'est pas en mon arc que j'espérerai, et mon glaive ne me sauvera pas. 8 Car tu nous as sauvés de ceux qui nous affligeaient, et tu as confondu ceux qui nous haïssaient.
b. Au verset précédent le psalmiste a exposé son espérance du rejet des ennemis ; mais ici il montre la raison des paroles qu'il a dites : Avec toi, nous dissiperons nos ennemis. Et c'est pourquoi il montre qu'il n'espère pas en lui-même : Car ce n'est pas en mon arc que j'espérerai. Car il est écrit au livre des Rois : « L'arc des forts a été vaincu, et les faibles ont été ceints de force. » De même il n'espère pas non plus dans le glaive, aussi dit-il : et mon glaive ne me sauvera pas. Et dans un autre psaume : « Que leur glaive soit brisé. » Car on combat avec ces deux armes : avec l'arc pour ceux qui sont éloignés ; d'où par l'arc est signifiée l'astuce avec laquelle l'homme se fait sa propre providence pour l'avenir, autrement dit, je n'espère pas dans ma providence. Avec le glaive on combat ceux qui sont proches : et dans le glaive est signifié le pouvoir, autrement dit, je n'espère pas en mon pouvoir, mais en toi.
c. D'où tiens-tu cette espérance ? De Dieu. Et il le montre par l'expérience : Car tu nous as sauvés de ceux qui nous affligeaient, ou bien dans le présent : car bien qu'ils nous nuisent corporellement, cependant ils ne peuvent pas nous nuire spirituellement ; ou bien dans l'avenir. Les saints sont affligés de deux manières : parfois dans les choses corporelles, en paroles ou en actions : « Sa rivale l'affligeait aussi et la tourmentait violemment, au point de lui reprocher que le Seigneur l'avait frappée de stérilité. » Parfois ils sont affligés spirituellement, lorsque pèchent ceux qui habitent auprès d'eux. Et ils sont libérés de ces afflictions par Dieu : et tu as confondu ceux qui nous haïssaient, puisqu'ils ne peuvent poursuivre contré nous leur intention : et ils sont confondus ici-bas, et ils seront confondus au jugement dernier : « Voici qu'ils seront confondus et qu'ils rougiront, tous ceux qui combattent contre toi ; ils seront comme s'ils n'étaient pas ; et ils périront, les hommes qui te contredisent. »
9 C'est en Dieu que nous serons loués tout le jour ; et c'est ton nom que nous confesserons a jamais.
3. Ici il expose l'action de grâce. Et d'abord la louange dont eux-mêmes seront loués. Puis la louange avec laquelle eux-mêmes loueront : car dans la Patrie ils loueront et seront loués ; c'est pourquoi il dit : tout le jour, c'est-à-dire pour l'éternité : et cette louange est sainte, parce qu'elle n'est pas en eux-mêmes mais en Dieu : « Parce que ma louange, c'est toi » - « Louez le Seigneur dans ses saints. » De même, elle sera continuelle, car elle durera tout le jour de l'éternité : « Mieux vaut un jour [passé] dans tes parvis, que des milliers [dans d'autres]. » Ils seront loués, dis-je, par le Christ : « Quiconque m'aura confessé devant les hommes, moi aussi je le confesserai », c'est-à-dire je le louerai, « devant mon Père qui est dans les cieux ». Une version de Jérôme lit : « In Deo laudabunt (C'est en Dieu qu'ils loueront) », car les saints loueront Dieu dans la Patrie en considérant sa bonté, et ils le confesseront en rendant grâce pour ses bienfaits.
10 Mais maintenant tu nous as repoussés et confondus, et tu ne sortiras pas, ô Dieu, avec nos armées.
II. Ici le psalmiste expose l'adversité qu'ont subie les saints du Nouveau Testament.
A) Et il expose d'abord l'adversité qu'ils subissent.
B) Puis il expose leur patience et leur fermeté : Tous ces [maux] sont venus sur nous.
A. Et à propos de l'adversité subie par les saints :
1) il traite d'abord de la cause de l'adversité, à savoir la suppression du secours divin ;
2) puis il traite de son enchaînement : 11 Tu nous as fait tourner le dos.
1. L'homme saint a trois choses en Dieu. Son refuge : « Seigneur, tu es devenu un refuge pour nous, de génération en génération. » - « C'est une tour très forte que le nom du Seigneur » ; le juste court vers Lui et il sera exalté. Ensuite, il a sa gloire en Dieu : « Mais toi, Seigneur, tu es mon soutien, ma gloire, et tu élèves ma tête. » Enfin le secours lui-même : « Mon secours vient du Seigneur, qui a fait le ciel et la terre. » Mais parfois, dans les choses extérieures, il semble que l'homme n'ait pas un refuge en Dieu ; et c'est pourquoi il dit : Mais maintenant tu nous as repoussés, parce qu'autrefois tu étais un refuge, et cela en tant que tu nous as défendus contre celui qui nous fait violence : « Le Seigneur a rejeté son autel, il a maudit sa sanctification ; il a livré à la main de l'ennemi les murs de ses tours ; ils ont élevé la voix dans la maison du Seigneur » ; mais son rejet ne porte pas sur les choses intérieures, « parce que le Seigneur ne rejettera pas son peupeé ; et son héritage, il ne l'abandonnera pas ». Semblablement, tu n'es pas ma gloire, puisque tu nous as confondus, puisque tu sembles nous confondre dans les choses extérieures, lorsque tu soutiens notre confusion. De même, tu avais coutume de nous conseiller et de nous aider ; mais à présent tu ne le fais pas, puisque tu ne sortiras pas, ô Dieu, avec nos armées. Et il s'exprime à la manière d'un chef. Il était habituel dans l'Ancien Testament que, lorsque Dieu secourait son peuple au combat, il sorte au-devant de lui : « Tu es sorti pour le salut de ton peuple, pour le salut avec ton Christ. » Mais cela ne signifie pas en Dieu un mouvement local, mais l'action de sa providence à l'égard des choses extérieures. Or maintenant Dieu ne sort pas, tandis qu'il permet que nous tombions sous nos ennemis. Il fait cela afin de nous détourner des biens terrestres, car s'il jouissait toujours de la prospérité dans les choses temporelles, l'homme servirait Dieu en vue de ceux-ci. Et si telle était notre intention, il nous frustrerait de ces biens. Donc, afin que notre amour ne soit pas mercenaire, et que notre intention ne s'applique pas aux choses matérielles, il soustrait cela à ses amis.
11 Tu nous as fait tourner le dos à nos ennemis, et ceux qui nous haïssent pillaient pour eux. 12 Tu nous as livrés comme des brebis que l'on mange, et tu nous as dispersés parmi les nations. 13 Tu as vendu ton peuple sans en recevoir le prix ; et il n'y a pas eu une multitude [d'acheteurs] dans leurs échanges.
2. Ici il expose l'enchaînement de l'adversité subie par les hommes saints quant à deux choses : Quant à la consolation qu'ils n'ont pas, et quant à l'affliction qu'ils subissent.
a. Les hommes qui vont à la guerre fuient, prennent, tuent, dispersent, et vendent.
En parlant de la fuite il dit : Tu nous as fait tourner le dos à nos ennemis, c'est-à-dire tu nous as fait fuir : « Que tu sortes par une seule voie contre eux », c'est-à-dire contre les ennemis, « et que ce soit par sept que tu fuies ». Cela se rapporte surtout aux saints martyrs, parce que dans la persécution, certains, ne pouvant pas la supporter, se sont détournés de la foi : « Il eût mieux valu pour eux de ne pas connaître la voie de la justice, que de l'avoir connue et de revenir ensuite en arriéré, s'éloignant du saint commandement qui leur avait été donné. » D'autres fuyaient : « Lors donc qu'on vous persécutera dans une ville, fuyez dans une autre. »
En parlant du pillage il dit : et ceux qui nous haïssent pillaient pour eux. - « C'est pour cela que nous avons été livrés au pillage, et à la captivité, et à la mort, et à la risée et à l'insulte chez toutes les nations parmi lesquelles vous avez été dispersés. » - « Mais le peuple lui-même a été pillé et ravagé. » Cela arrive même aux saints : car certains ont été dépouillés par le diable, c'est-à-dire ceux qui ont nié la foi ; pareillement certains ont été faits prisonniers par des ennemis qui fuyaient.
En parlant de la tuerie il dit : Tu nous as livrés comme des brebis que l'on mange, et cela parce qu'ils nous tuèrent corporellement.
En parlant de la dispersion il dit : et tu nous as dispersés parmi les nations, car c'est ce qui arriva littéralement aux Juifs. Il est écrit : « Tu seras dispersé dans tous les royaumes de la terre. » Et encore : « Je les disperserai à tous les vents ces hommes aux tempes rasées, et de tous côtés je ferai venir leur ruine » ; et semblablement les saints martyrs ont été dispersés.
En parlant de la vente il dit : Tu as vendu ton peuple sans en recevoir le prix ; car les martyrs ont ainsi été tués sans prix, c'est-à-dire sans grand prix. On montre par là qu'ils étaient tenus pour vils : « Pour rien vous avez été vendus, et sans argent vous serez rachetés. » Et il n'y a pas eu une multitude d'acheteurs dans leurs échanges. Une version de Jérôme lit : « Non foenerasti (Tu n'as pas prêté à usure). » L'usurier donne peu et reçoit beaucoup, autrement dit : Ils ne sont pas nombreux ceux qui sont gagnés ici, car ils furent plus nombreux à mourir qu'à se convertir. Ou bien : il n'y a pas eu une multitude, [ils ne furent pas nombreux ceux] qui à l'occasion de la mort de ceux-là chantèrent en l'honneur de Dieu : « Les voies de Sion sont en deuil, de ce qu'il n'y a [personne] qui vienne pour une solennité. »
14 Tu nous as rendus un sujet d'opprobre à nos voisins, un objet de grimace et de dérision pour ceux qui sont autour de nous. 15 Tu nous as faits la fable des nations et le hochement de tête des peuples.
b. Plus haut le psalmiste a exposé l'oppression des saints ; mais ici il exposé leur avilissement.
- Et il expose d'abord l'avilissement qu'ils ont subi extérieurement.
- Puis il montre ce qui en résulte dans leur coeur : 16 Tout le jour ma honte.
- En parlant de l'avilissement subi extérieurement, il expose l'action de cet avilissement du côté du mépris des hommes et du côté de l'objet du mépris.
Du côté du mépris des hommes, il y a d'abord le fait qu'on inflige un opprobre à quelqu'un, en disant par exemple qu'il est un bandit ou un adultère. Puis cet opprobre est subi comme sujet de dérision. Enfin il devient une fable, c'est-à-dire un objet d'infamie.
Du côté des personnes, parce que l'opprobre est dû d'abord à un compagnon ; puis il gagne d'autres personnes ; et pour finir il est divulgué.
Et le psalmiste dit cela en parlant d'abord de l'opprobre : Tu nous as rendus un sujet d'opprobre à nos voisins, c'est-à-dire à nos frères et à nos parents ; car les saints étaient qualifiés de sacrilèges, d'homicides, ou d'autres choses du même genre. Et cette action de se jouer (illusio) se fait par un signe, aussi dit-il : un objet de grimace. Et par la parole, aussi dit-il : et de dérision. Il y a grimace, lorsque quelqu'un tourne son prochain en dérision par un plissement du nez. Il y a dérision lorsqu'on dit avec amusement ou allégresse des choses qui se rapportent à la vitupération : « Je suis devenu un objet de dérision tout le jour, [et] tous me raillent en grimaçant. »
À ceux qui sont autour de nous, autrement dit : non seulement nous avons été livrés à nos voisins pour notre vitupération et notre opprobre, mais même aux autres. Ainsi les saints martyrs furent également raillés par tous : « Nous sommes devenus les ordures du monde, et les balayures rejetées de tous. »
Enfin les saints sont raillés par la divulgation : car les hommes parlent d'eux afin de le publier, aussi dit-il : Tu nous as faits la fable des nations. Lorsqu'on inflige du mal à quelqu'un, ce mal devient un sujet de fable, et l'on dit : ainsi il t'advient comme à un tel. Et de cette façon celui qui est maltraité est exposé à l'opprobre. Peut-être certains disaient-ils : cela t'arrive de la même manière qu'à Laurent ou à d'autres ; et c'est pourquoi il dit : Tu nous as faits la fable des nations, tu nous as donnés en exemple de mal et d'opprobre : « Il m'a rendu comme le brocard du peuple, et je suis un exemple devant eux. »
- « Et cette maison sera en exemple ; et quiconque passera auprès d'elle sera étonné, sifflera, et dira : "Pourquoi le Seigneur a-t-il fait ainsi à cette terre et à cette maison ?" » Cette moquerie se manifeste également par un acte et par un signe, aussi dit-il : le hochement de tête des peuples.
- « Les passants le blasphémaient, hochant la tête. » - « Ils ont parlé des lèvres, et ils ont hoché la tête. » Ou bien Tu nous as faits, c'est-à-dire à la ressemblance du Christ, en ce sens que tu nous as fait souffrir cela parce que le Christ a souffert, autrement dit : de même que les nations ont hoché la tête devant le Christ en le blasphémant, ainsi firent-ils à notre égard.
16 Tout le jour ma honte est devant moi, et la confusion de ma face m'a couvert, 17 à la voix de celui qui m'adresse des reproches et qui m'invective, à la face de mon ennemi et de celui qui me persécute.
- Le psalmiste traite ici de ce qui naît dans le coeur de l'opprobre extérieur.
· Et il expose d'abord la honte.
· Puis il y ajoute la cause : à la voix.
· Il commence par exposer la honte, et il dit : Tout le jour ma honte est devant moi, c'est-à-dire en ma présence. Ou bien : contre moi (contra me), c'est-à-dire continuellement contre ce qui m'est dû, à savoir l'honneur qui est dû aux hommes vertueux. La honte, selon le Philosophe, est la crainte de ce qui est honteux. Et il y a deux sortes de sentiments de honte. Le premier est en fonction de la vérité : et c'est le sentiment de honte dû au péché ; et cette honte n'arrive pas aux vertueux, parce qu'ils n'ont pas en eux la conscience du péché qui peut leur donner de la honte, mais elle échoit aux mauvais : « Quel fruit avez-vous donc tiré alors des choses dont vous rougissez maintenant ? » L'autre sentiment de honte est relatif à la réputation, à savoir les abjections et les opprobres que l'on subit extérieurement : ce sentiment de honte se trouve aussi chez les hommes parfaits ; et c'est à ce propos qu'il dit ici : Tout le jour ma honte est devant moi, etc. Le signe de la honte est la rougeur sur la face. La honte est la crainte de la confusion ; et cette passion excite le souffle vital, et c'est pourquoi le sang en est altéré. Si bien que les impudents pâlissent, tandis que les pudiques rougissent. Cependant les timides qui craignent la mort deviennent pâles, mais non point ceux qui craignent l'opprobre. Et la raison est due au fait que la nature se retranche dans un endroit où il y a de la défaillance ; aussi lorsque quelqu'un craint pour sa vie, le sang et le souffle se retirent vers le principe de la vie, c'est-à-dire vers le coeur. Mais lorsqu'il craint quelque chose extérieurement, le souffle et le sang se retranchent vers les choses extérieures. Ainsi dit-il : et la confusion de ma face m'a couvert, c'est-à-dire a recouvert mon visage de rougeur. Et il dit : la confusion de ma face, parce qu'elle naît sur la face ; mais lorsqu'elle est grande au point qu'elle couvre tout le coeur, elle est causée par le mauvais traitement et l'avilissement.
· En parlant de la cause de la honte il dit : à la voix de celui qui m'adresse des reproches. On parle de reproche lorsqu'on lance un outrage à la face de quelqu'un : « Durant tout le jour mes ennemis me faisaient des reproches. » La contradiction est une détraction cachée : « Si un serpent mord dans le silence, celui qui médit en cachette n'a rien de moins que ce serpent. » Ainsi arriva-t-il aux saints au temps de la persécution. Par exemple Maximin décréta que l'on arrête des femmes de mauvaise vie, et qu'elles déclarent que les chrétiens commettaient dès abominations avec elles ; aussi dit-il : à la voix de celui qui m'adresse des reproches. Ils adressèrent aussi des reproches au Christ, et vis-à-vis de lui-même et vis-à-vis de ses membres. Et c'est pourquoi il dit : à la face de mon ennemi et de celui qui me persécute. de mon ennemi, parce que la haine est la cause de la persécution : « Nous souffrons la persécution », à cause de la justice, « et nous le supportons ».
18 Tous ces [maux] sont venus et nous ne t'avons pas oublié, et nous n'avons pas iniquement agi contre ton alliance. 19 Et notre coeur ne s'est pas retiré en arrière ; et tu as détourné nos sentiers de ta voie.
B. Ici il montre leur persévérance dans le bien. Et il fait connaître leur stabilité dans deux domaines. L'homme doit persister dans ce qui regarde la foi, et dans la droite opération. Et il dit que malgré tous ces [maux] qui sont venus sur nous, c'est-à-dire malgré toutes les adversités précitées, ils n'ont ni abandonné la loi dans leur coeur (aussi dit-il : nous ne t'avons pas oublié - « Tu as fait passer tous tes flots sur moi » -) ni abandonné le culte divin, d'où ce qui suit : et nous n'avons pas iniquement agi contré ton alliance, c'est-à-dire nous n'avons pas abandonné la connaissance que nous avons de toi par la foi, ni ton alliance. L'alliance de Dieu est le pacte conclu avec lui dans la loi et au baptême ; c'est pourquoi celui qui agit contre l'observance du culte divin commet alors l'iniquité contre l'alliance de Dieu. Et cela les martyrs ne le commirent pas. La iuxta Hebraeos de Jérôme lit : « Et non sunt mentiti in te (Et ils ne t'ont pas menti) », c'est-à-dire qu'ils ne l'ont point offensé en parole : « Tiens-toi ferme dans ton alliance [avec Dieu]. » Semblablement ils sont stables dans les oeuvres de la justice, qui procèdent d'un coeur droit ; et c'est pourquoi il dit : notre coeur ne s'est pas retiré en arrière, par l'abandon de la charité : « Quiconque, ayant mis la main à la charrue, regarde en arrière est impropre au royaume de Dieu. » - « Ils ont abandonné le Seigneur, ils ont blasphémé le Saint d'Israël, ils sont retournés en arrière », c'est-à-dire les pécheurs. Mais la charité des martyrs ne s'est aucunement amoindrie quant à leurs propres oeuvres. Et il dit : « Tu n'as pas détourné nos sentiers de ta voie », autrement dit tu n'as pas permis que nos actions se détournent de la voie de ta justice : « Voici la voie, marchez-y ; et ne vous détournez ni à droite ni à gauche. » Ou bien : tu as détourné, selon une autre version, nos sentiers, c'est-à-dire ceux vers lesquels notre nature propre nous conduit, à savoir notre concupiscence. Et ainsi puisqu'elle conduit vers les voies de notre coeur, voies sur lesquelles il ne faut pas marcher, tu as écarté ces voies de ta propre voie.
20 Parce que tu nous as humiliés dans un lieu d'affliction, et l'ombre de la mort nous a enveloppés. 21 Si nous avons oublié le nom de notre Dieu, et si nous avons étendu nos mains vers un dieu étranger ; 22 est-ce que Dieu ne s'en enquerra pas ? car il connaît, lui, les choses cachées du coeur. Puisque, à cause de toi, nous sommes mis à mort tout le jour ; nous sommes regardés comme des brebis de tuerie.
Plus haut le psalmiste a exposé les maux que les saints ont subis, ainsi que leur constance ; mais ici il donne la raison des choses précitées. Et l'on peut relier ce verset à ce qui précède de deux manières, selon les deux sens susmentionnés. tu as détourné nos sentiers, c'est-à-dire les voies par lesquelles nous cherchons ce qui concerne la chair : et selon ce sens ce verset se relie à ce qui suit de la manière suivante ; autrement dit : tu n'as pas permis que nous nous détournions des choses qui concernent la chair, parce que tu nous as humiliés dans un lieu d'affliction. Ou bien : nous ne t'avons pas oublié, parce que tu nous as affligés et humiliés. Et ce sens est meilleur. Il expose deux maux, c'est-à-dire celui de la douleur et de la crainte. En parlant du premier mal il dit : dans un lieu d'affliction, c'est-à-dire en ce monde : « J'ai vu toutes les choses qui se font sous le soleil, et voilà qu'elles sont toutes vanité et affliction de l'esprit. » Et en cela Dieu humili les saints de deux manières : par une humiliation mettant à l'épreuve leur vertu : « J'humiliais mon âme par le jeûne, et ma prière revenait dans mon sein » ; et par une humiliation de contrainte : « On humilia ses pieds dans des entraves ; un fer transperça son âme, jusqu'à ce que s'accomplît sa parole. »
En parlant de l'humiliation de contrainte il dit : et l'ombre de la mort nous a enveloppés, c'est-à-dire le signe de la mort future : car l'ombre s'avance ; ensuite nous recevons la prédiction de la mort. Ou bien : l'ombre de la mort, c'est-à-dire les pécheurs qui sont dans les ténèbres, et [qui] nous ont soumis à eux et à leur servitude : « Il considère lui-même la fin de toutes choses, et aussi la pierre [cachée] dans l'obscurité et l'ombre de la mort. Un torrent sépare d'un peuple étranger ceux que le pied de l'homme indigent a oubliés, et qui sont hors de la voie. »
Si nous avons oublié le nom de notre Dieu, etc. Ici il prouve ce qu'il a dit.
1) Et il commence par faire connaître ces choses.
2) Puis il expose le jugement divin.
3) Enfin il en donne un signe visible.
1. Ainsi dit-il : « J'ai dit : nous ne t'avons pas oublié, etc. » Et c'est pourquoi il le fait connaître : Si nous avons oublié le nom de notre Dieu, si, c'est-à-dire non. De même : si nous avons étendu nos mains vers un dieu étranger, c'est-à-dire étranger à la nature de la divinité et au culte des Juifs, autrement dit si nous les prions comme des dieux, ce qui est agir iniquement contre l'alliance de Dieu.
2. Et si nous commettons ces choses, cela exigé le jugement de Dieu. Et le jugement de Dieu est suffisant pour s'enquérir de cela ; aussi dit-il : est-ce que Dieu ne s'en enquerra pas ?, autrement dit au contraire, puisqu'il sait toutes choses ; d'où ce qui suit : car il connaît, lui, les choses cachées du coeur. - « Le coeur de l'homme est dépravé et inscrutable ; qui le connaîtra ? », autrement dit Dieu seul.
3. De même il prouve cela par un signe visible : car s'ils avaient voulu s'écarter de Dieu, les saints n'auraient aucunement souffert en ce monde de maux tels qu'ils les endurent à présent.
a. Et il expose d'abord la cause pour laquelle ils souffrent, car c'est la cause qui fait le martyre ; c'est pourquoi il dit : à cause de toi, nous sommes mis à mort tout le jour. - « Mais qu'aucun de vous ne souffre comme homicide, ou voleur, ou médisant, ou avide du bien d'autrui. Et si c'est comme chrétien, qu'il ne rougisse point, mais qu'il glorifie Dieu en ce monde. »
b. Puis il expose les maux qu'ils subissent : et il commence par montrer que ces maux sont dus à la gravité de leur châtiment, à sa persistance, et à l'opinion.
- La gravité de leur châtiment : Puisque [...] nous sommes mis à mort.
- La persistance, car c'est tout le jour.
- « Chaque jour, je meurs, par la gloire que je reçois de vous en Jésus-Christ notre Seigneur. »
- L'opinion, c'est qu'ils croyaient les tuer non en tant que bienheureux, mais comme mauvais et dignes de mort ; et c'est pourquoi il dit : nous sommes regardés comme des brebis de tuerie, pour le bien des hommes, ou pour la patience des martyrs, autrement dit : pourquoi sommes-nous mis à mort tout le jour, et pourquoi sans protestation supportons-nous cela comme des brebis conduites à la tuerie ? Parce qu'il en fut ainsi pareillement pour le Christ.
23 Lève-toi, pourquoi dors-tu Seigneur ? Lève-toi, et ne nous rejette pas jusqu'à la fin. 24 Pourquoi détournes-tu ta face, oublies-tu notre misère et notre tribulation ? 25 Car notre âme est humiliée dans la poussière, et notre ventre est collé à la terre. 26 Lève-toi, Seigneur, aide-nous, et rachète-nous à cause de ton nom.
III. Dans cette troisième partie du psaume, le psalmiste invoque le secours de Dieu.
A) Et il expose d'abord la question de celui qui s'étonne.
B) Puis il formule sa demande du secours divin.
A. Nous nous étonnons donc de ce que Dieu permette à ses saints d'être ainsi affligés. Et cet étonnement peut être dû à un manque de volonté, ou de connaissance de sa part.
Le fait qu'il ne veuille pas est dû à deux choses : ou bien à cause de sa paresse, ou bien à cause de son mépris.
En parlant de la paresse il dit : pourquoi dors-tu Seigneur ? autrement dit : est-ce à cause de la paresse que tu permets que nous soyons affligés ? Et il est dit s'endormir (obdormire) à cause de l'effet : « Vois, il ne s'endormira pas, ni ne dormira, celui qui gardé Israël. »
En parlant du mépris il dit : et ne nous rejette pas jusqu'à la fin, c'est-à-dire finalement, bien que tu paraisses nous avoir rejetés pour un temps. Et on dit cela du Christ, afin qu'il soit notre parole, autrement dit : tu t'es caché, et tu n'es pas encore ressuscité dans la foi dès nations. Lève-toi sur eux, et que nous ne soyons pas rejetés loin de celles-ci.
Pourquoi détournes-tu ta face ? Son manque de connaissance est dû à deux choses :
Ou bien parce qu'il ne voit pas, et c'est pourquoi il dit : détournes-tu ? Lorsque Dieu vient en aide, il semble regarder ; quand il ne vient pas en aide, il semble se détourner : en regardant, « j'ai vu l'affliction de mon peuple en Égypte, et j'ai entendu sa clameur à cause de la dureté de ceux qui président aux travaux ». - « Ne détourne pas ta face de moi ; ne te retiré point, dans ta colère, de ton serviteur. » Ou bien : Pourquoi détournes-tu ta face ?, de sorte que nous ne te voyons pas : car dans la mesure où nous te verrions, nous ne souffririons d'aucun mal.
Ou bien parce qu'il a oublié ; et c'est pourquoi il dit : Pourquoi oublies-tu notre misère et notre tribulation ? Ici il énumère les maux que nous endurons. Et il y a un triple mal : Dans les choses extérieures, dans le corps, et dans l'âme.
En parlant des choses extérieures il dit : oublies-tu notre misère ? car au sens littéral ils étaient pauvres à cause des biens qui leur avaient été enlevés : « Vous avez supporté avec joie l'enlèvement de vos biens, sachant que vous avez une meilleure et durable richesse. »
En parlant du corps il dit : notre tribulation, car « nombreuses sont les tribulations des justes ».
En parlant de l'âme il dit : Car notre âme est humiliée dans la poussière. Certains sont humiliés dans leur âme, d'autres dans leur corps, d'autres encore dans le tréfonds de leur esprit ; et c'est pourquoi il dit : notre ventre est collé à la terre. Et il emploie le mot ventre pour désigner le corps. Ou bien notre âme est humiliée dans la poussière se réfère à l'effet dans les réalités spirituelles : car l'âme, c'est-à-dire la pensée de l'âme, pense à des choses terrestres : « C'est [du sein] de la terre que tu parleras, et de la poussière que sera entendue ta parole. » Et le ventre, c'est-à-dire la sensualité, adhère totalement à la terre. Ou bien autrement : Car notre âme est humiliée dans la poussière, etc., c'est-à-dire les plus parfaits d'entre nous sont humiliés par la poussière, c'est-à-dire par le pécheur : « Ils sont comme la poussière qu'emporte le vent de la face de la terre. » Semblablement, notre ventre, c'est-à-dire ceux qui parmi nous sont faibles, ont adhéré aux hommes terrestres, car ils se sont écartés de la foi.
B. Face à l'oubli il dit : aide-nous. Face à l'endormissement il dit : Lève-toi. Et face aux maux il dit : et rachète-nous à cause de ton nom.